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LE SECRET

Robert tressaillit en l’entendant prononcer le nom de son ami perdu, il devint pâle dans l’obscurité et sa respiration augmenta de force et de vitesse.

« Il était debout devant moi comme vous l’êtes maintenant, continua milady. Vous avez dit que vous renverseriez la maison de fond en comble et que vous déracineriez les arbres du jardin pour trouver le cadavre de votre ami. Vous n’auriez pas eu besoin de prendre tant de peine, George Talboys est au fond du vieux puits du bosquet derrière l’allée des tilleuls. »

Robert Audley leva les mains au-dessus de sa tête en poussant un cri d’horreur.

« Ô mon Dieu, dit-il après une horrible pause, toutes mes affreuses suppositions n’étaient donc rien à côté de la terrible vérité ?

— Il vint à moi dans l’allée des tilleuls, reprit lady Audley du ton dur avec lequel elle avait raconté son histoire. Je savais qu’il viendrait et je m’étais préparée de mon mieux pour cette rencontre. J’étais décidée à le corrompre, à le cajoler, à le défier, à tout faire plutôt que d’abandonner la position que j’avais conquise et revenir à la vie d’autrefois. Il vint, et me reprocha le complot de Ventnor. Il déclara que jamais de sa vie il ne me pardonnerait le mensonge qui lui avait brisé le cœur. Il me dit que je lui avais arraché le cœur, et qu’il ne lui en restait plus pour avoir pitié de moi. Il avoua qu’il m’aurait tout pardonné sans cette méchanceté calculée et que rien ne pouvait plus le détourner du projet qu’il avait conçu : celui de me traîner devant mon second mari et de me forcer à tout confesser. Il ne savait pas que j’avais sucé la folie en suçant le lait de ma mère. Il ne savait pas qu’il était possible de me rendre folle. Il me tourmenta comme vous m’avez tourmentée… il fut sans pitié comme vous l’avez été. Nous étions dans le bosquet au bout de l’avenue des tilleuls. J’étais assise sur la maçonne-