Page:Braddon - Le Secret de lady Audley t2.djvu/257

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
249
DE LADY AUDLEY

fois pendant les soirées d’été, Phœbé devint pâle comme un spectre et recula en me disant : « Pas là !… pas là !…

— Pourquoi donc ? lui demandai-je.

— Parce que je suis nerveuse, ce soir, et qu’on m’a dit qu’il était hanté. »

« Je n’insistai pas, et en la menant vers la porte, je lui dis que tous les contes qu’elle avait entendus étaient absurdes. À peine eus-je causé quelques instants avec elle, que je m’aperçus qu’elle avait quelque chose, et je lui demandai ce qui l’inquiétait.

— Je ne sais pas ce que j’ai ce soir, me répondit-elle, je ne suis pas comme de coutume ; c’est peut-être à cause de ma frayeur d’hier.

— Quelle frayeur ? Ta maîtresse t’a-t-elle fait des reproches ? »

« Elle ne me répondit pas tout de suite, mais elle sourit de la manière la plus étrange que j’aie jamais vue.

— Non, Luke, ce n’est pas cela, dit-elle ensuite, milady est toujours aussi bonne pour moi, peut-être plus encore, et je crois que si je lui demandais de m’acheter une ferme ou un fonds d’auberge, elle y consentirait sans que je la pressasse trop. »

« D’où venait ce revirement d’idées !… Phœbé m’avait dit, quelques jours avant, que milady était égoïste et dépensière, et que nous n’aurions pas de longtemps ce que nous voulions.

— Voilà un changement qui m’étonne, repris-je.

— Il y a de quoi, en effet, » ajouta-t-elle avec le même sourire de tout à l’heure.

« Et elle tourna sur ses talons.

— Oh ! je vois ce que c’est, Phœbé ; tu me caches quelque chose qu’on t’a dit ou que tu as découvert. Si tu veux agir de la sorte avec moi, tu as tort, je t’en avertis. »