Page:Brochard - De l’erreur, 2e éd., 1897.djvu/12

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
6
de l’erreur

peut être certain sans le savoir. L’âme ne décide pas d’elle-même si elle est certaine ou non ; elle n’a pas à chercher de critérium de certitude. Ce critérium n’existe pas : le vrai est à lui-même sa marque. — Notre langage, formé sous l’influence de ces idées, ne distingue pas entre le critérium de la vérité et le critérium de la certitude, et nous disons indifféremment que nous sommes certains ou qu’une chose est certaine.

Quel nom donner à cette doctrine ? Idéaliste, elle l’est à coup sûr ; mais bien d’autres, celle de Kant par exemple, le sont également. D’ailleurs, on pourrait avec autant de justesse l’appeler réaliste. Le nom de philosophie de l’intuition ne lui convient pas non plus, car pour quelques-uns de ses adeptes, tels que Spinoza, la connaissance est plus qu’une intuition : c’est comme une pénétration de l’objet par la pensée. On peut la désigner sous le nom d’intellectualisme, puisqu’elle explique tout ce qui est par la seule intelligence, et juge de l’être par les idées que nous en avons ; elle sera encore mieux caractérisée, semble-t-il, par le nom de dogmatisme métaphysique ; et ce nom peut convenir à toute doctrine suivant laquelle l’esprit humain aperçoit directement l’essence des choses en soi.

Or, pour le dogmatisme métaphysique, quelle n’est pas l’importance du problème de l’erreur ? Comment ne pas être ébranlé dans la confiance illimitée qu’on accorde à l’esprit, lorsqu’on le voit capable de con-