Page:Bronte - La Maitresse d anglais - tome 1.djvu/23

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plus d’une heure s’écoula avant qu’elle se levât de son plein gré.

Graham essaya de réparer le soir même le mal qu’il avait fait sans le vouloir, mais il trouva Polly changée en une véritable statuette de marbre. Toute la journée du lendemain, il en fut de même. Dès qu’il la regardait, ses yeux restaient fixés à terre, ses lèvres closes. À la fin elle lui pardonna, mais la leçon ne fut pas perdue pour elle. Un jour que je la priais de porter un livre à Graham, dans son cabinet d’études :

— J’attendrai qu’il en sorte, dit-elle fièrement ; il ne se plaindra pas deux fois d’avoir été dérangé par moi.

Un grand caractère peut être logé, on le voit, dans un petit corps.

Graham avait un poney favori sur lequel il se promenait souvent. Polly le regardait d’ordinaire partir, et elle épiait son retour, perchée sur sa grande chaise près de la croisée. Faire quelques tours de manége sur le dos du fringant petit coursier eût été le comble de son ambition, mais elle ne s’abaissait jamais à demander une faveur. Graham la laissa longtemps languir sans lui faire la proposition qu’elle attendait. Enfin, il s’en avisa, mais trop tard.

— Mon père m’achètera un poney, dit-elle,