Page:Bronte - La Maitresse d anglais - tome 1.djvu/49

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rive ; qu’avais-je à perdre ? je n’exposais que moi. Plus d’une fois déjà, n’avais-je pas envisagé la mort même d’un œil tranquille ? Qui verserait une larme sur ma tombe ? Autant mourir, hors de l’Angleterre si ma destinée ; n’était pas de vivre.

Je m’informai, dans la soirée, des jours de départ des paquebots pour les différents ports du continent. Le lendemain matin, il en partait un pour Ostende. On m’avait parlé de la Belgique comme d’un pays de ressources, d’une sorte de pied-à-terre des Anglais sur le continent. Partons pour Ostende ! Le garçon qui avait connu mes oncles me conseilla de me rendre, le soir même, à bord, pour ne pas manquer le départ. Il me donna toutes les instructions qu’il crut utiles en recommandant au cocher du fiacre de me déposer avec ma malle à l’embarcadère même du navire, et non dans les mains des bateliers. Le cocher ne tint aucun compte de cette recommandation ; il me fit descendre où il lui plat, et, dès qu’il eut reçu son argent et sa gratification, il fouetta, ses chevaux et décampa, me laissant, moi et ma pauvre malle, à la merci desdits bateliers. Ce fut un moment de crise. La nuit était profonde, on distinguait à peine les objets à la lueur d’une lampe vacillante ; les bateliers se disputaient ma malle avec d’affreux jurons.