Page:Bronte - La Maitresse d anglais - tome 1.djvu/78

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dégradant. Je me chargerais également d’élever des enfants ou de tenir compagnie à une dame âgée. J’accepterais enfin toutes les fonctions qui ne seraient pas au-dessus de mes forces physiques. Madame écoutait tout cela sans mot dire, et, à en juger par sa physionomie, mon récit ne choquait pas son oreille.

— Il n’y a que les Anglaises, dit-elle enfin, pour courir de pareilles aventures. Sont-elles donc intrépides ces femmes-là !

Elle me demanda mon nom, mon âge. Elle s’assit, en face de moi et me regarda. Il n’y avait dans ce regard ni commisération ni intérêt. Pas une lueur de sympathie, pas une ombre de pitié, ne traversèrent son visage pendant notre longue conversation à bâtons rompus. Je sentais qu’elle n’était pas femme à se laisser détourner d’un pouce de son chemin par ses sensations. Ne consultant, au contraire, que son jugement, elle m’étudiait à loisir. Une cloche se fit entendre.

— C’est le signal de la prière du soir, dit-elle, en se levant, et, par son interprète, elle me pria de revenir le lendemain. Mais cela ne faisait pas mon affaire, je ne pouvais supporter l’idée d’affronter de nouveau les périls de l’obscurité et de la rue. D’un ton ferme et contenu, je m’adressai donc à elle personnellement, et non à la sous-maîtresse :