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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

Beethoven et Wagner, retrouvant, au passage d’une mélodie familière ou au jaillissement d’une harmonie amusante, la flamme du regard, le joli rire qui, chaque jour, hélas ! s’éteignaient.

Cette allégresse prodigieuse qui originalise à un si haut point les œuvres de Chabrier était la marque distinctive de son caractère. L’exubérance des gestes, la carrure solide du corps, l’accent auvergnat de la voix, proférant les propos les plus divers et les ponctuant, à intervalles égaux, des inévitables exclamations : « Eh ! bonnes gens ! » ou « C’est imbécile ! », la crânerie de ses chapeaux, l’audace de ses houppelandes donnaient à sa pittoresque personne une animation extraordinaire. Il jouait du piano comme jamais on n’en avait joué avant lui et comme jamais on n’en jouera. Le spectacle de Chabrier s’avançant, du fond d’un salon peuplé de femmes élégantes, vers l’instrument débile et exécutant España en un feu d’artifice de cordes cassées, de marteaux en miettes et de touches pulvérisées était chose de drôlerie inénarrable, qui atteignait à la grandeur épique. Et il écrivait ainsi avec l’abondance verveuse, la gaieté énorme qu’il apportait à tout.

C’est par l’Étoile, une opérette jouée aux Bouffes-Parisiens, il y a une quinzaine d’années, que débuta le futur auteur de Gwendoline. Mais