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THÉORIE DE LA TERRE.

tiré les conséquences suivantes, que je pouvois comparer l’Océan entre l’Afrique et l’Amérique à un grand fleuve dont le cours est presque continuellement dirigé dans le nord-ouest ; que, dans son cours, il transporte un sable ou limon qu’il dépose sur ses bords, lesquels se trouvant rehaussés, augmentent le volume d’eau, ou, ce qui est la même chose, élèvent son niveau, et l’obligent de rétrograder selon la pente du rivage. Mais il y a un premier effort qui le dirigeoit d’abord : il ne retourne donc pas directement ; mais, obéissant encore au premier mouvement, ou cédant avec peine à ce dernier obstacle, il doit nécessairement décrire une courbe plus ou moins allongée, jusqu’à ce qu’il rencontre ce courant du milieu avec lequel il peut se réunir en partie, ou qui lui sert de point d’appui pour suivre la direction contraire que lui impose le fond : comme il faut considérer la masse d’eau en mouvement continuel, le fond subira toujours les premiers changements comme étant plus près de la cause et plus pressé, et il ira en sens contraire du courant supérieur, pendant qu’à des hauteurs différentes il n’y sera pas encore parvenu. Voilà, monsieur, quelles sont mes idées. Au reste, j’ai tiré parti plusieurs fois de ces courants inférieurs ; et moyennant une machine que j’ai coulé à différentes profondeurs, selon la hauteur du fond où je me trouvois, j’ai remonté contre le courant supérieur. J’ai éprouvé que, dans un temps calme, avec une surface trois fois plus grande que la proue noyée du vaisseau, on peut faire d’un tiers à une demi-lieue par heure. Je me suis assuré de cela plusieurs fois, tant par ma hauteur en latitude que par les bateaux que je mouillois, dont je