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THÉORIE DE LA TERRE.

face de chacune : s’il faut deux mille ans pour former sur la lave une légère couche de terre, il a dû s’écouler un temps plus considérable entre chacune des éruptions qui ont donné naissance à ces couches. On a percé à travers sept laves séparées, placées les unes sur les autres, et dont la plupart sont couvertes d’un lit épais de bon terreau ; ainsi la plus basse de ces couches paroît s’être formée il y a quatorze mille ans… En 1669, la lave forma un promontoire à Catane, dans un endroit où il y avoit plus de cinquante pieds de profondeur d’eau, et ce promontoire est élevé de cinquante autres pieds au dessus du niveau actuel de la mer. Ce torrent de lave sortit au dessous de Montpelieri, vint frapper contre cette montagne, se partagea ensuite en deux branches, et ravagea tout le pays qui est entre Montpelieri et Catane, dont elle escalada les murailles, avant de se verser dans la mer ; elle forma plusieurs collines où il y avoit autrefois des vallées, et combla un lac étendu et profond dont on n’aperçoit pas aujourd’hui le moindre vestige… La côte de Catane à Syracuse est partout éloignée de trente milles au moins du sommet de l’Etna ; et néanmoins cette côte, dans une longueur de près de dix lieues, est formée des laves de ce volcan : la mer a été repoussée fort loin, en laissant des rochers élevés et des promontoires de laves qui défient la fureur des flots, et leur présentent des limites qu’ils ne peuvent franchir. Il y avoit, dans le siècle de Virgile, un beau port au pied de l’Etna ; il n’en reste aucun vestige aujourd’hui : c’est probablement celui qu’on a appelé mal à propos le port d’Ulysse. On montre aujourd’hui le lieu de ce port à trois ou quatre milles dans l’intérieur du pays : ainsi la lave