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MOSAÏQUES DES VIIe — IXe SIÈCLES.

pendentifs au-dessus des colonnes de la nef centrale sont ornés de deux emblèmes chrétiens, de provenance grecque (copie moderne) ; la frise avec les portraits des évêques est presque l’unique exemple (du moins conservé en copie) de ces séries de portraits, assez fréquentes dans les églises du commencement du moyen-âge[1].

De ce style, je citerai à Rome les Mosaïques de la tribune fie S. Agnese fuori [a] (625-633), et d’une des chapelles latérales du Baptistère du Latran, l’Oratorio di S. Venanzio [b] (640-642). Ce dernier travail produit l’impression d’une pure œuvre d’artisans. — À remarquer encore quelques fragments : dans le petite abside de S. Stefano rotonde [c] (642-649) ; — sur l’un des autels à gauche à S. Pietro in Vincoli [d] (Saint Sébastien, image votive datant de la peste de 680 ; le saint est tout drapé et représenté en vieillard), etc.

Les mosaïques du chœur de S. Ambrogio [e] à Milan (832) rompent tout à fait avec la tradition byzantine, bien que lee inscriptions soient en partie grecques. Les traits du visage ont des contours grossiers, les draperies sont de teintes brusquement changeantes (blanc, vert, rouge), la distribution dans l’espace des figures, de grandeur très inégale, est tout à fait maladroite. Et pourtant il y a là beaucoup plus de vie que dans les mosaïques romaines du même temps[2].

Ces dernières, en effet, à pertir du ixe siècle, tombent en une barbarie grossière, que l’histoire générale de la culture ne permet guère d’expliquer. Partout ailleurs l’art byzantin nous offre une exécution singulièrement plus élégante.

Le plus remarquable historiquement de toutes ces mosaïques, celle du triclinium de Léon III (vers 800), dans le transfert à la chapelle Sancta Sanctorum [f] (ou Scala sancta), a été tout à fait renouvelée, bien que très exactement copiée sur les premiers dessins. (Des deux côtés de la demi-coupole sont représentées les deux investitures : le Christ donnant les clefs à saint Sylvestre, l’étendard à Constantin ; Saint Pierre donnant l’étole de Léon III, l’étendard à Charlemagne ; dans les portraits de ces deux derniers il y a encore une lueur d’authenticité.) — Avec les papes suivants, la mosaïque devient de plus en plus grossière et inerte, jus-

  1. À S. Paul [g], près de Rome, on travaille encore à une série de médaillons en mosaïque, qui doit remplacer l’ancienne collection des portraits des papes. Comparer les têtes de papes en guise de consoles dans la cathédrale [h] de Sienne (voir Architecture) et les portraits des papes à S. Pietro in Grado [i], devant Pise
  2. Cette mosaïque offre de plus cet intérêt qu’elle contient tous les saints patrons de Milan. Le Christ trône sous une gloire, entouré des saints Michel et Gabriel, saint Gervais et saint Protais. Plus bas, dans des cadres ovales, Candida, Satyrus et Marcellina. À gauche, la villa de Tours et saint Ambroise près du tombeau de saint Martin. À droite, la ville de Milan, saint Ambroiee et saint Augustin assis devant des pupîtres. — Il faudra du temps pour que de tels éléments naissent des tableaux comme la Madone de Foligno et la Sainte Cécile de Raphaël, ou les Sante Conversazioni de Titien. — dans une chapelle latérale à droite de l’église, la coupole contient un buste de S. Satyre [j] sur fond d’or, un peu plus ancien que les mosaïques de l’abside.