Page:Burney - Evelina 2.djvu/15

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Le Capitaine voulut savoir des détails : Sir Clément se mit alors à lui faire une longue histoire ; il lui conta qu’en passant près de la Tour, avec quelques amis, il avoit entendu la voix d’un homme qui crioit graçe en français ; & s’étant informé de quoi il s’agissoit, il avoit appris que cet étranger venoit d’être arrêté pour crime de trahison.

„ Le pauvre diable, continua-t-il, ayant remarqué que je parlois sa langue, me supplia de l’écouter ; il me protesta qu’il étoit honnête homme, qu’il n’étoit en Angleterre que depuis peu, & qu’il se proposoit de repasser dans sa patrie, dès qu’une Dame de sa connoissance seroit de retour d’une course qu’elle étoit allé faire à la campagne. ”

Madame Duval changea de visage & redoubla d’attention.

„ Quoique je n’aime pas trop cette foule d’étrangers qui viennent sans cesse fondre sur notre pays, je ne pus m’empêcher pourtant d’avoir pitié de ce malheureux, qui ne savoit pas assez l’Anglois pour se défendre : mais il me fut impossible de le secourir ; la populace s’étoit déjà ameutée, & je crains qu’il n’en ait été rudement traité.

„ L’a-t-on un tant soit peu plongé ? ” lui demanda le Capitaine.

„ Je crois qu’oui.