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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/33

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comme il paroît par ses Mémoires [1], que, si le roi l’aimoit véritablement, Sa Majesté devoit elle-même l’en instruire. Le Cardinal, qui les observoit en tout, remarquoit bien leur amour et leur embarras. Le duc de Saint-Aignan [2], qui étoit un peu peste et malin, saisit le trouble où étoient ces deux amoureux pour le leur augmenter, et entreprit de faire jaser Son Éminence, qui, de son côté, ne demandoit pas mieux que d’en apprendre le sujet. En adressant la parole à toute la compagnie, il dit finement : « J’eusse cru qu’un prince de l’Église, sous-vicaire de Jésus-Christ, paroissant en quelque endroit, loin d’y apporter le trouble, y mettroit la paix ; mais je vois que je me suis trompé. »

Le Roi et mademoiselle de Mancini, qui rougirent à ce discours, interdirent Son Éminence ; mais, comme elle fut revenue à elle, elle dit au Duc : « Vous nous connoissez mal ; nous faisons nos devoirs dans l’Église quand le cas le requiert ; nous ne sortons point de notre sphère dans nos fonctions, puisqu’il est vrai que dans mon particulier j’en soutiens le fils aînée [3]. Bien loin de

  1. Les Mémoires de Marie de Mancini n’ont paru qu’en 1676, à Cologne, sous ce titre, en désaccord avec le sujet : Mémoires de M. M. Colonne, grand connétable de Naples. Deux ans plus tard, parut à Leyde (1678) une Apologie, ou les véritables Mémoires de madame Marie de Mancini, connétable de Colonne, écrits par elle-même. Voy., sur l’autorité que peuvent présenter ces ouvrages, Amédée Renée, Les Nièces de Mazarin, p. 286 (Note).
  2. La terre de Saint-Aignan ne fut érigée en duché que par lettres de 1661, par conséquent trois ans après les événements de cette histoire.
  3. Le roi de France, fils aîné de l’Église.