Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/200

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Par la suite l’enfant fit montre parfois d’une indépendance inimaginable ; s’il lui déplaisait de se mettre au piano, et pour peu qu’on insistât, il s’y refusait obstinément et ne jouait pas de plusieurs jours.

Sa faible complexion s’accommodait mal des règlements scolaires ; on dut le retirer d’assez bonne heure du lycée où il poursuivait ses études, afin de lui éviter les fatigues que son frêle tempérament ne pouvait supporter. « Il avait besoin, pour dilater sa poitrine étroite, du souffle vivifiant et résineux des forêts, des sains aromes qui se dégagent des gerbes et des foins coupés. »

Le portrait qu’a tracé George Sand du prince Karol, qu’on sait être la reproduction, sans ressemblance garantie, mais assez approximative néanmoins, de Chopin, nous permet de nous représenter celui-ci à l’âge où la romancière nous le dépeint.

« Doux, sensible, exquis en toute chose, il avait à quinze ans, les grâces de l’adolescence réunies à la gravité de l’âge mûr.

«  Il resta délicat de corps comme d’esprit ; mais cette absence de développement musculaire lui valut de conserver une beauté, une physionomie exceptionnelle, qui n’avait, pour ainsi dire, ni âge, ni sexe. Ce n’était point l’air mâle et hardi d’un descendant de cette race d’antiques magnats qui ne savaient que boire, chasser et guerroyer ; ce