Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/357

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Après les crises, il était insupportable, irritable, étrange et paraissait irresponsable. Il cherchait l’occasion de querelles et, dans tout ce qu’on lui disait, voyait l’intention de le blesser. Le mettait-on sur ses sujets de prédilection, alors il recommençait à prendre feu : au bout d’une heure sa bonne humeur était revenue ; seuls, la pâleur de son visage, l’éclat de ses yeux, le halètement de sa respiration laissaient soupçonner son état morbide. Cette irascibilité, qui était, pour une bonne part, pathologique, on la retrouve chez la plupart des personnages créés par Dostoïevsky.

Raskolnikoff, Nejdanoff, Stravoguine, Aliocha sont des nerveux, comme l’était Dostoïevsky. Jusqu’à l’excellent Pokrovsky, des Pauvres Gens, qui ne peut dire quatre mots sans s’emporter ; jusqu’à Schatoff, « le meilleur homme du monde », qui en est en même temps « le plus irascible », tous s’impatientent, se fâchent, parlent d’un ton irrité. Ce sont leurs nerfs qui les tourmentent et les agitent, leurs nerfs de race fine et impressionnable, jetée par la destinée dans des aventures et des épreuves au-dessus de leur caractère. « Toi, tu as les

    machinalement dans votre mémoire et elle vous a guidé à votre insu. Du reste, pendant que je vous parlais je voyais bien que vous aviez l’esprit absent. » Toute la théorie du psychisme inférieur se trouve dans ces lignes. (Cf. l’étude du Pr Grasset, dans la Revue des Deux-Mondes, 15 mars 1905.)