Page:Cahiers de la Quinzaine, 4e série, n°5, 1902.djvu/35

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beaucoup de gloire, et pour survivre dans le temps. Enfin son effort, plus haut que son œuvre, commande la stupeur et le respect.

Et nous arrivons à son Acte. Rien de plus logique, en un sens, que cette éclosion finale. Les études quotidiennes de Zola le prédisposaient à se passionner pour tous les conflits de son temps. Ayant revécu son passé, achevé les « Rougon-Macquart », il était forcément amené à se soucier du présent. La politique l’attirait. Sa haine même pour elle en est une preuve. Paul Alexis a finement noté que Son Excellence Eugène Rougon est le portrait de Zola ministre bien plus que celui du pâle Eugène Rouher. Dans le manifeste intitulé : République et Littérature, dans les diatribes enragées d’Une Campagne, au Figaro, il avait maintes fois manifesté sa passion pour la chose publique. Un drame judiciaire, mieux que tout autre, devait captiver le romancier épris d’intrigues compliquées — se rappeler le goût de Balzac pour les aventures de police. — Ce drame, de plus, était humain, s’incarnait en une victime, une ombre d’homme torturé, et par là dépassait la politique pour atteindre, émouvoir toute pensée vivante. Enfin Zola touchait à l’âge où l’artiste le plus obstiné entend sonner un glas intime qui lui conseille une action plus humble, un dévouement plus immédiat : Byron a eu Missolonghi, Lamartine a eu 48, Victor Hugo a eu Jersey, Tolstoï a croisé Soutaieff… On dirait qu’une fatalité les pousse, pour être bien sûrs d’épuiser leur force, à tâter toutes les issues. Émile Zola écrivit J’accuse !… Ici, pour la première fois, son idéal fut