Page:Cahiers de la Quinzaine - 8e série, numéros 1 à 3, 1906.djvu/261

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il nous les représentait, du même geste il devenait, il se faisait un de leurs plus éminents, peut-être leur plus éminent représentant. Chez les classiques jamais un livre de feinte et de duplicité n’eût été le livre d’un jeune homme.

On ne peut plus se représenter aujourd’hui comment toute une génération, la génération des hommes qui ont aujourd’hui entre trente-sept et quarante-huit ans, accueillit l’Avenir de la Science, comment elle s’y reconnut, s’y salua elle-même, et s’y glorifia. En ce livre elle reconnut ses plus secrètes aspirations. On ne peut plus imaginer l’enthousiasme avec lequel ce livre fut invoqué. Pour nous au contraire, pour les hommes de ma génération, notre enthousiasme, plus débordant encore peut-être, était un enthousiasme d’adolescence.

En réalité. En réalité au contraire ce livre est un livre extrêmement cauteleux. Tout le talent, toute l’infinie souplesse de l’auteur, du jeune auteur, toute une érudition, immense pour cet âge, ou qui veut se donner pour immense, n’y tend qu’à masquer, envelopper, noyer les difficultés, les impossibilités métaphysiques de l’histoire prématurément apparues à une intelligence avertie. Tout le livre est plein de ces difficultés, de ces impossibilités. Tout l’effort sous-tendu du livre est de les embarbouiller ensemble. Afin que le lecteur, enthousiaste ou charmé, ne s’y reconnaisse plus. C’est un immense et perpétuel détournement d’enthousiasme, disons le mot, un véritable abus de confiance, et il y aurait même dans le langage des tribunaux correctionnels un mot technique, le nom d’une