Page:Cahiers de la quinzaine, série 9, cahier 1, 1907.djvu/110

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à la fin) ils faisaient, les bons gars, comme on a toujours fait dans tous les pays du monde où l’on a su marcher proprement quand on a voulu marcher proprement : ils mettaient leurs deux sabots sur leur épaule, attachés avec une ficelle par les deux trous comme chez le marchand, et ils s’en allaient nu-pieds ; je le sais ; je me rappelle très bien.

Vivent les sabots de bois. Ils mettaient leurs deux sabots sur leur sac ; à cette seule condition qu’ils eussent un sac ; et leur sac même, quand ils en avaient un, ce qui était au moins aussi rare que d’avoir des sabots, et presque aussi rare que d’avoir des souliers, leur sac n’était point cet énorme sac moderne raide des armées modernes, ce sac scientifique, où l’on a tout mis, où l’on a tout prévu, excepté, ce sac ennemi de l’homme, scientifiquement fait, scientifiquement établi, scientifiquement construit, scientifiquement imaginé, où l’on a scientifiquement tout mis, scientifiquement tout prévu, hormis, excepté qu’on a scientifiquement oublié d’y mettre ceci : que l’homme aurait envie de le porter ; de l’avoir, de le garder, sur ses deux épaules, de marcher dessous ; sac moderne, ennemi de l’homme, où scientifiquement et modernement on a tout prévu, excepté, scientifiquement et modernement, un petit coin bien abrité, dedans, pour y mettre la bonne volonté, la (bonne) envie qu’aurait l’homme de le porter ; de sorte qu’aujourd’hui, je veux dire que demain, inéluctablement, infailliblement, scientifiquement, il y aurait des quantités de ces sacs scientifiques modernes, uniquement faits pour les grandes manœuvres, et encore, par les plus puissantes commissions militaires scientifiques modernes, qui iraient s’asseoir (je dis bien les sacs, je ne