Page:Cahiers de la quinzaine, série 9, cahier 1, 1907.djvu/120

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nous ; ainsi nous allons sur la plaine, sur les routes et par les chemins de la plaine ; nous y allons par hygiène, hélas ; tout au plus, tout au mieux par entraînement, pour y faire de l’entraînement ; pour combattre nos migraines ; pour nous détendre le cerveau ; les nerfs ; pour notre foie ; misères ; pour nos digestions ; en somme tout cela c’est de la marche, ou de la promenade, en quelque sens pharmaceutique ; le mieux que nous puissions faire, c’est que ce soit pour nous maintenir mobilisables jusqu’à l’âge de quarante-cinq ans ; c’est tout ce que nous avons, tout ce que nous pouvons avoir de militaire ; et tout ce qui nous sauve un peu, c’est cet amour de la nature, que nous avons, qui nous reprend aussitôt que nous arrivons là-haut, que nous avions, qui nous avait, qui nous tenait profondément déjà, regret obscur, temporellement éternel, invincible, à la maison, toujours, avant de partir, couché sur notre table d’écritures et d’épreuves.

Nous allons sur les routes ; et instantanément les traces de nos pas s’y effacent ; le soleil en fait de la poussière, la pluie en fait de la boue. Sur le macadam des routes, aujourd’hui quelquefois goudronné, les traces de nos pas ne comptent pas plus, ne demeurent pas plus que toutes ces traces de grosses roues d’autos, les traces de nos pas sont aussi fugitives, aussi mobiles que toutes ces traces de ces énormes roues d’automobiles qui vont s’effaçant l’une l’autre.

Ils sont allés sur les routes ; ils allaient, ils marchaient pourtant comme nous : ni le soleil n’a jamais mis en poussière, ni l’eau ne mettra jamais en boue, ni aucune roue de char n’effacera jamais la trace de leur pas.

Ce qu’il y a de plus fort, les bougres, c’est qu’ils le