Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 5-6, 1912.djvu/7

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« Préfectures, commissariats, dotations, pots de vin, sinécures, traitements, pensions, remplacent les exactions proconsulaires, les dépossessions, les latinfundia, les ventes d’esclaves, les confiscations, toutes les fournitures de grains, de fourrages, de bois, etc. C’est surtout au moment de la prise de possession que se font les bons coups. Que de services à créer, d’emplois à distribuer ! que de promotions ! quelle bureaucratie ! et, pour les gens d’affaires, que de spéculations ! Voilà la guerre dans sa phase la plus élevée, la guerre avec isonomie, sans expropriation et sans pillage.

« Un effet de ce système est de faire croître les dépenses de l’État qu’on devrait appeler de leur véritable nom frais de guerre, à mesure que la hiérarchie se renforce et s’élève, à mesure, par conséquent, que l’État s’étend ou, ce qui revient au même, que le gouvernementalisme se développe. Sous l’empire de Napoléon Ier qui faisait encore la guerre à l’ancienne mode, l’extension du pouvoir central, son ingérence, étaient loin, malgré la sévérité de l’administration, de ce qu’elles sont devenues depuis. Le budget n’atteignait pas un milliard. Sous la restauration, la Monarchie de Juillet, la République de 1848 et le second Empire, la hiérarchie politique s’est développée, l’administration centrale s’est fortifiée de tout ce qu’a perdu la vie locale, et le budget de 1860 est porté à un milliard neuf cent vingt-neuf millions. »

Le budget actuel dépasse quatre milliards ; le mouvement dessiné par Proudhon s’est développé sur une formidable échelle; l’État démocratique moderne est devenu le monstre dévorant que nous connaissons; le gouvernementalisme bourgeois, sous la troisième République, s’est enflé et travaillé à l’égal de la grenouille de la fable, et nos socialistes d’État ne rêvent que de le porter