Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/109

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observât de rendre fidèlement cette réponse : « Vous entendez bien, ajouta-t-elle, le roi ne peut consentir à ce qu’on l’enlève. » M. le comte d’Inisdal fut très-mécontent de la réponse du roi, et sortit, en disant : « J’entends, il veut d’avance jeter tout le blâme sur ceux qui se dévoueront. » Il partit, et je pensai que le projet serait abandonné. Cependant la reine resta seule avec moi, jusqu’à minuit, à préparer ses cassettes, et m’ordonna de ne point me coucher. Elle pensait qu’on interpréterait la réponse du roi comme un consentement tacite, et simplement comme un refus de participer à l’entreprise. J’ignore ce qui se fit chez le roi, pendant cette nuit ; mais je regardais de temps en temps aux fenêtres : je voyais le jardin libre ; je n’entendais aucun bruit dans le palais, et le jour vint me confirmer dans l’idée que le projet avait été abandonné. « Il faudra pourtant bien s’enfuir, me dit la reine peu de temps après : on ne sait pas jusqu’où iront les factieux. Le danger augmente de jour en jour[1]. » Cette princesse

  1. Si l’anecdote suivante n’est pas vraie, elle est du moins très-vraisemblable d’après ce qu’on vient de lire :

    « L’effervescence du 13 avril 1790, occasionée par la chaleur des débats sur l’imprudente motion de dom Gerle à l’Assemblée nationale, ayant fait craindre que les ennemis de la patrie ne voulussent tenter d’enlever le roi au milieu de la capitale, M. de La Fayette promit de faire bonne garde, et dit à Louis XVI que s’il reconnaissait dans les mécontens des dispositions alarmantes, il l’en avertirait par un coup de canon, tiré de la bat-