Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/176

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jouir ce jour-là du bonheur de le voir quelques instans environné de sujets fidèles ; les acclamations furent sincères.

On avait choisi, pour la représentation aux Français, la Coquette corrigée, uniquement parce que c’était le triomphe de mademoiselle Contat. Cependant l’opinion qu’avaient répandue les ennemis de la reine, venant s’unir dans ma pensée au titre de cette comédie, j’en trouvais le choix très-maladroit, et ne savais comment le dire à Sa Majesté. Mais l’attachement sincère donne du courage ; je m’expliquai ; elle m’en sut gré, et fit demander une autre comédie : on donna la Gouvernante.

La reine, Madame fille du roi, madame Élisabeth, furent de même très-accueillies à ce spectacle. Il est vrai que l’opinion et les sentimens de tous les spectateurs qui remplissaient les loges, ne pouvaient qu’être favorables ; on s’était occupé, avant ces deux représentations, de bien composer le parterre. Mais les jacobins, à leur tour, prirent la précaution contraire avec tant d’avantage, au théâtre Italien, que le tumulte y fut extrême. On donnait les Événemens imprévus de Grétry ; madame Dugazon eut malheureusement l’idée de s’incliner vers la reine, en chantant dans un duo ces paroles : Ah ! comme j’aime ma maîtresse ! À l’instant plus de vingt voix s’élèvent du parterre, en criant : Pas de maîtresse ! pas de maître ! liberté ! Quelques hommes répondent des loges et des balcons : Vive la reine ! vive le roi ! vive à jamais le roi et la reine ! On répond