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plicité d’un ecclésiastique, environné d’une foule immense. La reine crut que c’était un abbé que l’on allait jeter dans le bassin des Tuileries ; elle ouvrit sa fenêtre avec précipitation, et envoya un valet de chambre savoir ce qui se passait dans le jardin. C’était l’abbé Grégoire que les hommes et les femmes des tribunes reconduisaient en triomphe pour une motion qu’il venait de faire à l’Assemblée nationale contre l’autorité royale. Le lendemain, les journalistes démocrates peignaient la reine témoin de ce triomphe, montrant à sa fenêtre, par des gestes expressifs, combien elle était outragée des honneurs rendus à ce patriote.

La correspondance de la reine avec l’étranger se faisait en chiffres. Celui qu’elle avait préféré ne peut jamais être deviné, mais il faut une patience extrême pour en faire usage. Chaque correspondant doit avoir un ouvrage de la même édition. Paul et Virginie était celui qu’elle avait choisi. On indique par des chiffres convenus la page, la ligne où se trouvent les lettres que l’on cherche et quelquefois un mot d’une seule syllabe. Je l’aidais dans ce travail à chercher les lettres ; et très-souvent je lui faisais une copie exacte de tout ce qu’elle avait chiffré sans savoir un mot de ce qui avait été écrit.

Il y avait toujours dans Paris plusieurs comités secrets occupés d’éclairer le roi sur les démarches des factieux, et d’influencer quelques-uns des comités de l’Assemblée.

M. Bertrand de Molleville eut de grandes rela-