Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/226

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fer, la reine avait su qu’il en avait parlé à quelques gens de ses amis, et que cet homme, auquel le roi, par habitude, accordait une trop grande confiance, était un jacobin. Elle en avertit le roi, et le décida à remplir un très-grand porte-feuille de tous les papiers qu’il avait le plus d’intérêt à conserver, et à me le confier. Elle l’invita, en ma présence, à ne rien laisser dans cette armoire, et le roi, pour la tranquilliser, lui répondit qu’il n’y avait rien laissé. Je voulus prendre le porte-feuille et l’emporter dans mon appartement ; il était trop lourd pour que je pusse le soulever. Le roi me dit qu’il allait le porter lui-même ; je le précédai pour lui ouvrir les portes. Quand il eut déposé ce porte-feuille dans mon cabinet intérieur, il me dit seulement : « La reine vous dira ce que cela contient. » Rentrée chez la reine, je le lui demandai, jugeant, par les paroles du roi, qu’il était nécessaire que j’en fusse instruite. « Ce sont, me répondit la reine, des pièces qui seraient des plus funestes pour le roi, si on allait jusqu’à lui faire son procès. Mais ce qu’il veut sûrement que je vous dise, c’est qu’il y a dans ce même porte-feuille un procès-verbal d’un conseil d’État, dans lequel le roi a donné son avis contre la guerre. Il l’a fait signer par tous les ministres, et, dans le cas même de ce procès, il compte que cette pièce serait très-utile. » Je demandai à qui la reine croyait que je devais confier ce porte-feuille. « À qui vous voudrez,