Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/239

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doigt posé sous son œil droit. — Il n’a pas même porté la main à son menton, reprit le roi ; au reste ce n’est que de l’argent volé. L’escroc ne s’en vantera pas, et la chose restera ignorée. Parlons d’autres choses. » Il se tourna vers moi et me dit : « Votre père était intime ami de Mandat, qui commande en ce moment la garde nationale ; faites-le moi connaître ; que dois-je attendre de lui ? » Je lui répondis que c’était un de ses sujets les plus fidèles, mais qu’avec beaucoup de loyauté et fort peu d’esprit, il était dans l’engouement de la constitution. « J’entends, dit le roi, c’est un homme qui défendrait mon palais et ma personne, parce que cela est imprimé dans la constitution, et qu’il a juré de la maintenir ; mais qui se battrait contre le parti qui veut l’autorité souveraine : c’était bon à savoir d’une manière positive. »

Le lendemain, la princesse de Lamballe me fit demander de très-grand matin : je la trouvai assise sur un canapé en face d’une fenêtre qui donne sur le Pont-Royal. Elle occupait alors l’appartement du pavillon de Flore, de plain-pied à celui de la reine. Elle me dit de m’asseoir auprès d’elle ; Son Altesse tenait sur ses genoux une écritoire. « Vous avez eu bien des ennemis, me dit-elle, on a voulu vous perdre auprès de la reine ; on est bien loin d’avoir réussi. Savez-vous que moi-même, vous connaissant moins particulièrement que la reine, on m’avait mise en défiance de vous, et qu’au