Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/310

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

gardes l’ordre de défendre toute voie de fait à ses subordonnés.

Je n’ai jamais bien su ce qui avait fait changer d’avis au roi sur son départ. Je rentrai chez moi dans une grande anxiété, et je me jetai sur mon lit, tout habillé. Il me fut impossible de fermer l’œil par le bruit que faisait la populace parisienne qui remplissait les rues de Versailles. À la pointe du jour, j’entrai dans mon cabinet dont les fenêtres donnaient sur la cour des ministres, et je vis au moment même les grilles s’ouvrir, et une multitude effrénée de bandits armés de piques et de bâtons, quelques-uns de sabres et de fusils, s’élancer dans la cour et courir de toutes ses forces à la cour des princes, où l’on trouve l’escalier qui menait chez Leurs Majestés. Tous ces gens passèrent sous mes fenêtres sans m’apercevoir. J’attendis un quart-d’heure environ, et vis un bon nombre d’entre eux ramenant une douzaine de gardes-du-corps qu’ils avaient saisis dans la salle des gardes de la reine, et qu’ils allaient égorger dans la place d’armes. Heureusement pour ces malheureux, M. de La Fayette parut avec des soldats aux gardes qu’il employa à faire lâcher prise aux bandits. On sait qu’ils étaient montés tout droit à l’appartement de la reine ; que les gardes-du-corps les avaient laissés entrer dans leur salle, sans obstacle, d’après l’ordre du roi ; que cependant ceux qui étaient en sentinelle à la porte de l’antichambre de la reine, firent quelque résistance, et donnèrent le temps aux valets de pied de