Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/311

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veille dans l’intérieur, de barricader la porte avec des coffres et des chaises, et que Sa Majesté, avertie par le bruit, se sauva chez le roi par la communication de leurs appartemens. Les bandits pénétrèrent alors, et, trouvant leur proie échappée, ne firent aucun désordre dans l’appartement. Mais ils avaient assassiné deux gardes-du-corps et blessé plusieurs autres dans la salle des gardes, ce qui fut le fruit de l’ordre de non-résistance donné par le roi la veille. M. de La Fayette monta chez le roi, et trouva la porte de l’antichambre, nommée l’œil-de-bœuf, fermée et barricadée. On parlementa avec les gardes-du-corps qui s’y étaient réfugiés pour préserver l’appartement de Sa Majesté. Sur les assurances que donna M. de La Fayette, on ouvrit. Il y plaça des grenadiers qui, de concert avec les gardes-du-corps, tinrent cette issue fermée jusqu’au départ du roi pour Paris. La porte par laquelle le roi sortait ordinairement pour monter en voiture, demeura constamment libre ; le peuple de Paris ne la connaissait pas. Je me couvris d’une redingote pour traverser cette foule qui remplissait la cour, et montai à l’appartement du roi. Je le trouvai avec la reine et le dauphin, sur le balcon de sa chambre à coucher, protégé par M. de La Fayette qui haranguait de temps en temps cette canaille ; mais tous ses discours ne pouvaient arrêter les cris : À Paris ! à Paris ! Il partit même de la cour quelques coups de fusil, dont heureusement personne ne fut atteint. Le roi rentrait de temps en