Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/335

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ainsi sollicitée par sa souveraine, des larmes coulaient de ses yeux ; mais elle se concentrait dans ce peu de mots : « Bon Dieu ! Madame, ils feraient périr M. Sauce : j’aime bien mon roi ; mais, dame, écoutez, j’aime bien mon mari. Il est responsable, voyez-vous. » Pendant que cette bizarre et inutile scène se passait dans la boutique, le peuple, à la nouvelle de l’arrestation du roi, arrivait en foule de toutes parts. M. Goguelat, faisant une dernière tentative, demanda aux dragons s’ils voulaient protéger la sortie du roi ; ils répondirent par des murmures et en baissant la pointe de leurs sabres. Un individu inconnu tira un coup de pistolet en visant M. Goguelat ; il fut légèrement atteint par la balle. M. Romeuf, aide-de-camp de M. de La Fayette, arriva en ce moment. Il avait été choisi, après la journée du 6 octobre 1789, par le commandant de la garde parisienne, pour être habituellement de service auprès de la reine ; elle lui adressa des reproches amers sur l’objet de sa mission. « Si vous voulez faire distinguer votre nom, Monsieur, lui dit la reine, vous avez choisi un étrange et odieux moyen, et qui sera suivi des plus funestes conséquences. » Ce militaire voulait hâter le départ. La reine, entretenant encore l’espoir de voir arriver M. de Bouillé avec une force imposante pour dégager le roi de la position critique où il se trouvait, prolongeait, le plus possible, son séjour à Varennes. La première femme du dauphin, feignant de souffrir d’une colique vio-