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ter assemblé toute la nuit ; le procureur-général avait offert de la venir passer lui-même au château si le roi le croyait nécessaire. Le roi en témoigna le désir ; j’en instruisis à l’instant M. Rœderer, et ce magistrat se rendit auprès du roi : il était alors près de minuit.

» Vers une heure du matin, le tocsin n’ayant commencé à sonner que depuis le moment où M. le maire avait quitté le roi, Sa Majesté me chargea d’en informer M. Pétion et de lui témoigner le désir qu’elle aurait de voir fermer les portes de la terrasse dite des Feuillans. La terrasse avait été déclarée faire partie de l’enceinte de l’Assemblée nationale. Elle seule pouvait en disposer. Aussi, en exprimant le désir du roi, je pressai M. Pétion d’en faire la demande à l’Assemblée nationale. M. le maire le pouvait avec d’autant plus de facilité, que, d’une part, le tocsin avait sonné, la générale battu ; qu’on avait la certitude que le rassemblement se formait, et que, depuis près de trois quarts-d’heure, l’Assemblée nationale avait fait rappeler M. le maire à sa barre.

» M. Pétion reçut les observations du roi. Il en sentit la justesse. Avant même d’aller à l’Assemblée nationale, il fit fermer la porte qui donne sur la cour du manége ; le suisse en reçut l’ordre verbal en présence de tous les officiers municipaux et de divers grenadiers qui avaient accompagné M. le maire. Je dois cet hommage à la vérité. Un grenadier se laissa dans ce moment emporter au-delà des bornes. Sa sensibilité prévalut sur son obéissance.

« M. le maire, dit-il, nous voyons avec la plus vive satisfaction, avec une reconnaissance respectueuse, que votre zèle l’emporte toujours sur la malveillance de vos ennemis ; que vous êtes partout où vous pouvez servir utilement la patrie : mais cela ne suffit pas. Pourquoi souffrez-vous dans Paris ces rassemblemens partiels qui en amèneront successivement de généraux ? Pourquoi vous laissez-vous dominer par des factieux qui nous perdront ? Pourquoi, par exemple, le sieur Santerre est-il toujours avec vous ; toujours hors d’atteinte