Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/43

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le plus déraisonnable : presque tous voulurent visiter le petit Trianon. L’extrême simplicité de cette maison de plaisance ne répondant pas à leurs idées, quelques-uns insistèrent pour qu’on leur fît voir jusqu’aux moindres cabinets, disant qu’on leur cachait les pièces richement meublées. Enfin, ils en indiquèrent une qui, selon eux, devait être partout ornée de diamans, avec des colonnes torses, mélangées de saphirs et de rubis. La reine ne pouvait revenir de ces folles idées, et en entretint le roi qui, à la description que ces députés avaient faite de cette chambre aux gardiens de Trianon, jugea qu’ils cherchaient la décoration de diamans de composition qui avait été faite, sous le règne de Louis XV, pour le théâtre de Fontainebleau.

Le roi pensait que ses gardes-du-corps, retournant dans leurs provinces, après avoir fait leur quartier de service à la cour, racontaient ce qu’ils y avaient vu, et que ces récits exagérés devaient souvent finir par y être dénaturés. Cette première idée du roi, sur la recherche de la chambre de diamans, fit penser à la reine que l’opinion sur le prétendu goût du roi pour la boisson devait aussi venir des gardes qui accompagnaient sa voiture, lorsqu’il chassait à Rambouillet. Le roi, n’aimant pas à découcher, partait de ce rendez-vous de chasse après son souper ; il s’endormait profondément dans sa voiture, et n’était réveillé qu’au moment de son arrivée dans la cour royale : il descendait de voiture au milieu des gardes-du-corps, en chancelant comme un