Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/44

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

homme à moitié éveillé, ce qui avait été pris pour un état d’ivresse[1].

La plupart des députés arrivés avec des préventions dues à l’erreur, ou semées par la malveillance, se logèrent chez les plus petits particuliers de Versailles, dont les propos inconsidérés ne contribuèrent pas peu à entretenir ces préventions. Tout enfin disposait l’esprit des députés à servir les projets des chefs de la rébellion.

Peu de temps après l’ouverture des états-généraux, le premier dauphin mourut. Ce jeune prince était tombé, en quelques mois, d’une santé florissante dans un rachitisme qui lui avait courbé l’épine du dos, allongé les traits du visage, et rendu

  1. Il est curieux de rapprocher l’anecdote qu’on va lire, du reproche injuste fait à Louis XVI, et dont madame Campan explique si naturellement les causes.

    « La comédie d’Ésope à la Cour, de Boursault, renferme une scène dans laquelle le prince permet aux courtisans de lui dire ses défauts. Ils s’accordent tous à le louer outre mesure ; un seul ose lui reprocher d’aimer le vin et de s’enivrer, vice dangereux chez tous les hommes, et plus encore dans un roi. Louis XV, pour qui ce goût honteux était déjà presque une habitude, dès l’année 1739, trouva la pièce de Boursault mauvaise, et en défendit la représentation à la cour. Après la mort de ce prince, le temps du deuil expiré, Louis XVI demanda une représentation d’Ésope à la Cour, trouva cette pièce pleine de sens, faite pour instruire les rois, et ordonna qu’on la lui remît souvent sous les yeux. »

    (Note de l’édit.)