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Son retour à Versailles remplit sa famille d’une joie inexprimable ; il se félicitait dans les bras de la reine, de sa sœur et de ses enfans, de ce qu’il n’était arrivé aucun accident, et ce fut alors qu’il répéta plusieurs fois : « Heureusement, il n’a pas coulé de sang, et je jure qu’il n’y aura jamais une goutte du sang français versé par mon ordre. » Maxime pleine d’humanité, mais trop hautement énoncée dans ces temps de factions !

La dernière démarche du roi fit espérer à beaucoup de gens que le calme allait rendre à l’Assemblée les moyens de continuer ses travaux et d’amener promptement le terme de sa réunion. La reine ne s’en flatta nullement ; le discours de M. Bailly au roi l’avait blessée autant qu’il l’avait affligée. « Henri IV avait conquis son peuple, et ici c’est le peuple qui avait reconquis son roi. » Ce mot de conquête l’offensait ; elle ne pardonnait pas à M. Bailly cette belle phrase d’académicien.

Cinq jours après le voyage du roi à Paris, le départ des troupes et l’éloignement des princes et des

    ce grand prince. L’année suivante, le parti qui souleva le peuple pour la cherté des blés, enlevant l’écriteau Resurrexit de la statue de Henri IV, le plaça sous celle de Louis XV, alors détesté. Louis XVI, qui le sut, se retira dans ses petits appartemens où il fut surpris avec la fièvre et en pleurs, sans que ce jour-là on pût le déterminer, ni à dîner, ni à se promener, ni à souper. On peut juger par ce trait quels supplices il endura au commencement de la révolution, lorsqu’il fut accusé de ne pas aimer le peuple français. »

    (Note de l’édit.)