Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/8

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propositions comme très-avantageuses, et le roi en parla de nouveau à la reine ; ce fut en ma présence. Je me souviens que la reine lui dit que si réellement le marché n’était pas onéreux, le roi pouvait faire cette acquisition, et conserver ce collier pour les époques des mariages de ses enfans, mais qu’elle ne s’en parerait jamais, ne voulant pas qu’on pût lui reprocher dans le monde d’avoir désiré un objet d’un prix aussi excessif ; le roi lui répondit que ses enfans étaient trop jeunes pour faire une dépense qui serait augmentée par le nombre d’années où elle resterait sans utilité, et qu’il refuserait définitivement cette proposition. Bœhmer se plaignit à tout le monde de son malheur ; et des gens raisonnables lui reprochaient d’avoir pensé à réunir des diamans pour une somme si considérable, sans avoir eu le moindre ordre à ce sujet. Cet homme avait acheté la charge de joaillier de la couronne, ce qui lui donnait quelques entrées à la cour. Après plusieurs mois de démarches inutiles et de vaines plaintes, il obtint une audience de la reine qui avait près d’elle la jeune princesse sa fille ; Sa Majesté ignorait pour quel sujet Bœhmer avait demandé cette audience, et ne croyait pas que ce fût pour lui reparler d’un bijou deux fois refusé par elle et par le roi.

Bœhmer se jette à genoux, joint les mains, pleure et s’écrie : « Madame, je suis ruiné, déshonoré, si vous n’achetez mon collier. Je ne veux pas survivre à tant de malheurs. D’ici, Madame, je pars pour aller me précipiter dans la rivière. — Le-