Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/9

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vez-vous, Bœhmer, lui dit la reine, avec un ton assez sévère pour le faire rentrer en lui-même ; je n’aime point de pareilles exclamations ; et les gens honnêtes n’ont pas besoin de supplier à genoux. Je vous regretterais, si vous vous donniez la mort, comme un insensé auquel je prenais intérêt, mais je ne serais nullement responsable de ce malheur. Non-seulement je ne vous ai point commandé l’objet qui, dans ce moment, cause votre désespoir ; mais toutes les fois que vous m’avez entretenue de beaux assortimens, je vous ai dit que je n’ajouterais pas quatre diamans à ceux que je possédais. Je vous ai refusé votre collier ; le roi a voulu me le donner ; je l’ai refusé de même : ne m’en parlez donc jamais. Tâchez de le diviser et de le vendre, et ne vous noyez pas. Je vous sais très-mauvais gré de vous être permis cette scène de désespoir en ma présence et devant cette enfant. Qu’il ne vous arrive jamais de choses semblables. Sortez. » Bœhmer se retira désolé, et l’on n’entendit plus parler de lui.

Pendant que la reine était en couches de madame Sophie, elle me dit que M. de Sainte-James[1] l’avait fait prévenir que Bœhmer s’occupait encore de la vente de son collier, et que Sa Majesté devait, pour sa propre tranquillité, chercher à savoir ce que cet homme en avait fait ; elle me recommanda

  1. Très-riche financier.
    (Note de madame Campan.)