Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/82

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roi leur dit d’attendre quelques instans, craignant d’exposer leur vie, et leur fit dire ensuite de se rendre à l’œil-de-bœuf. Madame de Tourzel, alors gouvernante des enfans de France, venait de conduire Madame et le dauphin chez le roi. La reine revit ses enfans. On peut se peindre cette scène d’attendrissement et de désolation[1].

Il n’est pas vrai que les brigands aient pénétré jusqu’à la chambre de la reine, et percé de coups d’épée ses matelas. Les gardes-du-corps réfugiés furent les seuls qui entrèrent dans cette chambre ; et si la foule y eût pénétré, ils auraient été massacrés. D’ailleurs, quand les assassins eurent forcé les portes des antichambres, les valets de pied et les officiers de service, sachant que la reine n’était plus chez elle, les en prévinrent avec un accent de vérité auquel on ne se méprend jamais. À l’instant, cette criminelle horde se précipita vers l’œil-de-

  1. C’est au milieu même de cette scène d’attendrissement et de désolation, que des Mémoires, récemment publiés en Angleterre, voudraient frapper la reine du coup le plus cruel dont elle pût être atteinte. Madame Campan n’aurait pu lire ce qu’on se proposait d’accréditer sous son nom qu’avec un sentiment égal d’indignation et de douleur. Je ne m’expliquerai pas davantage, et l’on approuvera ma réserve. Je n’ajouterai plus qu’un mot : si l’on voulait placer dans la bouche de madame Campan une accusation contre Marie-Antoinette, c’est avoir mal pris son temps que de choisir précisément l’instant où elle a représenté cette princesse sous les traits les plus touchans et les plus nobles.
    (Note de l’édit.)