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LA JEUNESSE EN 1829.

prison. Devenus hommes, engagés dans les routes si diverses ouvertes par la variété des situations et des idées, ils ne conservent des relations du premier âge que l’usage, pour ne pas dire la charge, d’un tutoiement fort incommode lorsque l’accord des pensées ne correspond plus à la familiarité du langage. Il n’en est point ainsi quand l’homme a fait élection réfléchie d’opinions et de croyances, à cette époque, la plus heureuse de la vie où la raison, fortifiée par l’étude, n’a encore rien enlevé au généreux essor du cœur.

Je partageais habituellement avec M. de Cazalès le poids de la rédaction politique du Correspondant. Ancien page du roi Louis XVIII, alors auditeur dans le ressort de la cour royale de Paris, le fils de l’illustre constituant ne tarda pas à quitter la carrière sur le seuil de laquelle il venait de mettre le pied, pour chercher dans le sacerdoce ce repos que, de nos jours plus encore qu’au temps de saint Augustin, le cœur de l’homme ne rencontre qu’en Dieu. M. Henri Gouraud donnait au journal une collaboration non moins assidue. Encore étudiant en médecine, il avait entrepris sur les physiologistes modernes une série de travaux qu’il désertait assez souvent pour faire l’école buissonnière, en s’aventurant dans ce que l’on commençait à nommer la littérature intime.

Notre rédaction, qui s’efforçait de répudier la qualification exclusive de parisienne, recevait de plusieurs départements un concours précieux. De Bayonne lui arrivait une série de lettres des plus piquantes sur toutes les questions touchant à l’enseignement. L’im-