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Page:Cavallucci - Bibliographie critique de Marceline Desbordes-Valmore, tome 1.pdf/247

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PAUVRES PLEURS 233 tention perpétuelle et conduit au fort de Ham, où il resta six ans. Il y écrivit de nombreux ouvrages d’histoire et de juris- prudence, jusqu’à sa libération qu’autorisa une ordonnance royale du 17 octobre 1836. Il se retira alors dans les envi- rons de Bordeaux, où il mourut, le 2 janvier 1854, d’une at- taque d’apoplexie. Gergerès, l’ami bordelais de Marceline, avait attiré l’atten- tion de la poétesse sur les malheurs de Peyronnet, bordelais comme lui. Avec son impétuosité habituelle, Marceline, sans faire état des opinions réactionnaires de l’ancien ministre et sans lui tenir rigueur d’avoir envoyé en prison son ami Bé- ranger, répondit par ces lignes au plaidoyer de Gergerès : … Paris, 4 décembre 1833. Votre notice sur M. de Peyronnet m’a ouvert le cœur. J’ai pleuré !… J’ai trouvé de lui un article charmant dans un journal d’éducation (1) ; mais je ne peux ranger mes larmes sur un malheur si grave et si profond. Il aurait de grandes élégies autour de sa prison, si les âmes stupéfaites de sa destinée pouvaient se lire et se voir. Moi qui peux souffrir et soupirer sur les boulevards, je n’ose plus me croire à plaindre, quand je regarde une prison. C’est ce que je n’ai jamais compris ; mon cœeur et ma tête éclatent quand j’y pense longtemps, et hier encore, j’ai vu la tête du Tasse… Ah ! Dieu a donc bien fait la mort, puisque le monde est ainsi., , Le 23 décembre suivant, Marceline mandait encore à Ger- gerès en lui envoyant des vers pour Peyronnet (c’était la pre- mière esquisse du poème dont il est ici question) : "… En envoyant à votre illustre prisonnier les tristesses de mon cœur, vous ne saurez peut-être pas que vous m’avez fait éprouver une émotion terrible de surprise et d’attendrissement. J’ai reçu un élan de l’âme de M. Peyronnet. Je vous assure, Gergerès, que j’ai senti son âme près de moi dans des vers, des lignes (1) Il s’agit, sans doute, des "Femmes dans l’adversité, , dont il est question dans le titre du poème de Marceline. Les Femmes dans l’adversité, forment un chapitre des Pensées d’un prisonnier, ouvrage de Peyronnet qui parut en octo- bre 1834 (Paris, Allandin, 2 vol. in-8°).