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Page:Cavallucci - Bibliographie critique de Marceline Desbordes-Valmore, tome 1.pdf/368

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POÉSIES INÉDITES DE 1860

Marceline n’a cessé d’accabler son mari, ils ne pouvaient croire à la duplicité de la poétesse.

En effet il est encore assez difficile de croire que l’affection extraordinaire qu’elle témoignait à son mari n’ait pas été sincère. Il n’est pas moins difficile d’expliquer que le mari n’ait pas su qui était le père de Marie-Eugène, ni qu’il ne se soit jamais aperçu de rien ; car les relations de Latouche et de Marceline furent traversées d’incidents orageux et bizarres, dont leurs familiers ne furent pas sans percevoir les échos. « Le grand amour de la poétesse lui remonta du cœur dans la tête et n’en délogea plus », avait écrit M. Lucien Descaves après avoir montré combien Marceline aimait son mari. « Ce n’est pas un homme, c’est un souvenir qu’elle aima » après son mariage, avait affirmé M. Jacques Boulenger. Mais M. Fr. Ségu, à qui nous devons la révélation de pièces capitales, a fait précéder des lignes que l’on va lire la pénible histoire des amours de Marceline : « Marceline Desbordes a connu les joies et les troubles de la passion coupable. Tout était déchaîné autour d’elle, plaidera-t-on ; plus de règles, plus de frein ; sa vie même n’explique-t-elle pas ses fautes en partie ? Qu’on l’aime donc parce qu’elle a beaucoup péché, mais qu’on permette au nom de la morale de dénoncer et de condamner les tristes entraînements de ces amours romantiques. » (op. cit. p. 26).

Latouche fait de son mieux pour que Marceline oublie les torts qu’il a envers elle. Comme nous l’avons déjà dit, il corrige les vers de son amie, il traite avec le libraire Louis au sujet de la 2e édition des Poésies de Marceline (1820) ; il publie même dans la Minerve littéraire une pièce de vers sur la mort de Marie-Eugène qui avait fait nier, et pour cause, que Latouche fût le père de cet enfant tant pleuré. C’est sans doute à cette époque que Marceline écrivit les strophes révélatrices de l’Étonnement, qui parurent dans le Chansonnier des Grâces de 1831, puis dans les Pleurs de 1833, et dont l’épigraphe, signée du pasteur Ancillon, n’est pas moins éloquente : « Amour ! tu es le seul bonheur de la vie ; et cependant tu es le bonheur sans repos ! »