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Page:Cavallucci - Bibliographie critique de Marceline Desbordes-Valmore, tome 1.pdf/371

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POÉSIES INÉDITES DE 1860

« loup » qu’elle aime, lit avec passion les Poésies d’André Chénier, dont précisément Latouche avait donné la prenière édition.

Latouche ne cesse d’obliger son amie, de solliciter pour elle ministres et directeurs. Pas un jour il ne l’oublie, tandis que ses devoirs d’épouse retiennent Marceline auprès du lamentable comédien qu’aucun théâtre n’adopte. Au mois de juillet 1838, les Valmore sont à Milan, où les a appelés un impresario sans argent et sans scrupules. Marceline y écrit, un jour, le Billet de femme[1] que nous allons citer d’après un Carnet autographe de Marceline (Collection Lucien Descaves) :

Puisque c’est toi qui viens serrer encore
Notre lien.
Puisque c’est toi dont le regret m’implore,
Écoute bien :
Les longs serments, rêves trempés de charmes,
Écrits et lus,
Comme Dieu veut qu’ils soient payés de larmes,
N’en écris plus.

Nos jours lointains, glissés purs et suaves.
Comme des fleurs,
Nos jours blessés par l’anneau des esclaves
Pesants de pleurs,
De ces tableaux dont la raison soupire
Ôtons nos yeux,
Comme l’enfant qui s’oublie et respire,
La vue aux cieux.

Comme la plaine après l’ombre ou l’orage
Rit au soleil,
Séchons nos pleurs et reprenons courage,
Le front vermeil.
Ta voix, c’est vrai, se lève encore chérie
Sur mon chemin.
Mais ne dis plus : « à toujours », je t’en prie,
Dis : « à demain ».

  1. Cette pièce fait partie de Pauvres fleurs.