Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/259

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la raison, faire sur la raison libre peser les anciennes œuvres d’une raison moins libre. Ce serait toujours monnayer la servitude économique pour avantager déloyalement le personnel révolutionnaire.

Nous n’apportons pas avec nous, nous n’apportons ni comme une invention ni comme un héritage des sentiments inédits, fabriqués exprès pour nous, et portant la marque de cette fabrication. Nous n’entendons pas remplacer, suppléer, remettre au magasin les vieux sentiments qui ont fait la joie ou la consolation, le bonheur et la beauté du monde. Nous n’avons pas des sentiments nouveaux qui remplaceraient l’antique amour, l’amitié, les affections, les sentiments et les passions de l’amour, les sentiments et les passions de l’art, des sciences, de la philosophie. Nous ne sommes pas des dieux qui créons des mondes. Nous voulons devenir des économes utiles, des gérants avisés, des ménagers diligents. Nous ne demandons pas à créer des animalités ni des humanités, mais modestes nous demandons que les biens économiques de la présente humanité soient administrés pour le mieux, afin que la servitude économique étant soulevée des nuques, les têtes libres se redressent, les corps vivent en santé, les âmes aussi. Nous sommes avant tout modestes. Un socialisme orgueilleux serait une aberration. Un métaphysique serait criminel ou fou.

La raison ne procède pas de la pédagogie. Nous touchons ici au plus grave danger du temps présent. Malgré la complicité des mots mêmes, il ne faut pas que la pédagogie soit de la démagogie. C’est la pédagogie qui