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LIVRE DEUXIÈME

s’il ne quittait la vie monastique ; l’abbé s’obstina, se fit transporter à la Trappe, et guérit. Retourné à Perseigne, il écrivit à l’évêque d’Aleth : « Le temps de mes épreuves est près de finir : mon cœur n’en est pas moins rempli de misères. Je ne puis comprendre que j’aie la hardiesse de prendre une profession qui ne veut que des âmes détachées, et que mes passions étant aussi vivantes en moi qu’elles le sont, j’ose entrer dans un état d’une véritable mort. »

Il fit un adieu général au monde. D’une course nouvelle, il s’élança après le Fils de Dieu, et ne s’arrêta qu’à la croix.

On l’employa utilement pour son ordre pendant son noviciat. La réforme avait été établie au monastère de Champagne. Les moines résistaient ; la noblesse appuyait les moines : l’esprit frondeur n’était pas encore éteint : restait à rendre l’arrière-faix de la discorde. Ce moment de péril interrompit le noviciat de Rancé : on le fit courir au secours de l’Étroite Observance. Vingt-cinq gentilshommes, conduits par le marquis de Vassé, sous prétexte d’une partie de chasse, se présentèrent à une abbaye dans le dessein d’en expulser le parti des réformes. Rancé arrivait ; il leur demanda ce