Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/69

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avait appliqué un vigoureux soufflet en lui disant : « Tais-toi donc, petit imbécile ; ne sais-tu pas qu’elle médite ? » Jacquot s’était frotté la joue et se le tint pour dit ; tout le monde en faisait autant. Aussi, de huit heures à midi, Jacquot disait tout bas à la cuisinière, la cuisinière disait au cocher, le cocher disait aux volailles de la basse-cour, qui le redisaient aux pierrots, qui le répétaient aux merles et à tous les vents du ciel :

« Frères, taisons-nous, elle médite ! »

Au coup de midi, la porte du lieu très saint se rouvrit doucement, et, comme la première fois, Mme Véretz s’avança sur la pointe des pieds, disant :

« Ma chère belle, est-il permis d’entrer ? »

Mme Corneuil fronça ses beaux sourcils et, d’un air boudeur, renferma ses papiers dans le plus élégant des buvards et son buvard dans les profondeurs de son secrétaire en bois de rose, dont elle eut soin, crainte des voleurs, de retirer la clef.

« On s’est donné le mot, dit-elle, pour ne pas me laisser un moment de repos.

— J’ai dû faire une course ce matin, répondit Mme Véretz. Est-ce que par hasard Jacquot aurait profité de mon absence ?…

— Jacquot ou un autre, je ne sais, mais on a fait