Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/78

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son oncle était charmant, et il mourait d’envie de l’embrasser ; il trouvait aussi que jamais Mme Corneuil n’avait été si belle, que le soleil avait des clartés inaccoutumées, qu’il pleuvait de la lumière sur son bonheur, que l’air embaumait et que toutes les choses de ce monde allaient à merveille. Il avait cependant un scrupule qui l’embarrassait et par instants faisait passer un nuage sur ses sourcils. En relisant le matin un des fragments de Manéthon, il s’était achoppé à un passage qui semblait contrarier sa thèse favorite, à laquelle il tenait comme à sa vie. Par intervalles, il se prenait à douter si ce fut vraiment sous le règne d’Apépi que Joseph, fils de Jacob, vint en Égypte ; puis il se reprochait son doute, qui lui revenait l’instant d’après. Cette contradiction le chagrinait, car il respectait beaucoup Manéthon. Mais quand il regardait Mme Corneuil, son âme rentrait dans le repos, et il croyait lire dans ses beaux yeux la preuve manifeste que le Pharaon qui ne connaissait pas Joseph était bien Séthos Ier, auquel cas le Pharaon qui l’avait connu était bien Apépi. Être tendrement aimé d’une belle femme, cela fait tout croire, tout devient possible, tout s’arrange, Manéthon, Joseph, le roi Apépi et le reste.

Que se passait-il dans le cœur du marquis ? De