Page:Chouinard - L'œil du phare, 1923.djvu/137

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
136
L’ŒIL DU PHARE

de reprocher à personne et qui complique son chagrin d’une orgueilleuse sauvagerie.

Élevé dans la pauvreté et l’humilité, il accusait néanmoins une grande fierté de caractère, plus impérieuse que toutes les tendresses de son cœur. Après la fête des Rois, aux froideurs graduellement accentuées de la famille Brillant pour sa vieille mère et pour lui-même, qui avaient remplacé des accueils si chaleureux et si spontanés, dans la solitude de son foyer de nouveau assombri par le deuil de l’oncle riche et secourable, il eut à loisir beau sujet de philosopher sur la double déconvenue de son cœur et de son esprit. Et c’est alors que les saines idées de son précepteur sur le bonheur vrai de la vie ne suffisaient plus à contredire celles de son cousin Émile.

Ah ! s’il avait eu, comme celui-ci, la fortune qui supplée à tant de choses aux yeux du monde, serait-il aujourd’hui cet être minable, désarmé par la pauvreté sous l’affront, en butte aux railleries de tout le village, d’autant plus secrètement