Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 2, 1864.djvu/257

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donne deux oboles, et l’emporte, par sa charité, sur les plus opulents. Une autre veuve n’avait qu’une poignée de farine et un peu d’huile, elle reçut néanmoins et nourrit le Prophète dont l’âme était aussi élevée que le ciel. Ainsi la pauvreté ne fut un obstacle ni à l’une ni à l’autre. N’apportez donc pas de vaines, d’inutiles excuses. Dieu ne demande pas des largesses abondantes, mais une volonté généreuse. L’aumône se mesure, non d’après le don, mais d’après l’intention. Vous êtes pauvre et le plus pauvre de tous les hommes ? Mais vous n’êtes pas plus indigent que cette veuve qui l’emporta de beaucoup sur les riches. Vous manquez, vous-même, du nécessaire ? Mais vous n’êtes pas plus dénué que la veuve de Sidon ; réduite à la dernière extrémité, attendant la mort, entourée de ses enfants, elle donne cependant ce qui lui reste, et dans cette extrême indigence, elle acquiert d’immenses richesses ; sa main fut comme une aire ; son urne comme un pressoir, et du dénuement elle fit sortir l’abondance.
Revenons à notre parabole pour ne pas tomber dans des digressions sans fin. À l’arrivée de l’Époux, les vierges tenaient donc le langage que je vous ai rapporté. Les sages envoyaient les autres chez les vendeurs ; mais ce n’était plus le temps d’acheter de l’huile. On n’en fait sa provision qu’en cette vie. Une fois ce monde quitté et le théâtre fermé, il n’y a plus ni remède, ni pardon, ni excuse pour les actions passées ; le châtiment seul reste. C’est ce qui arriva alors. Quand vint l’Époux, les vierges sages entrèrent avec leurs lampes ; les autres, se trouvant en retard, frappèrent à la porte et entendirent cette effroyable parole : Retirez-vous, je ne vous connais pas. Vous voyez encore ici comment Jésus-Christ honore ou châtie, couronne ou punit, reçoit ou rejette ; c’est lui qui porte les deux sentences la même vérité se prouve par les paraboles de la vigne, et des talents. Le Seigneur reçoit les bons serviteurs et les comble d’honneurs ; pour l’autre, il le fait lier et jeter dans les ténèbres extérieures.
3. Que répondent les hérétiques ? Rien de sensé ? Il a, disent-ils, le pouvoir de châtier et de couronner, de punir et de récompenser ; mais pour le trône du ciel, pour cet honneur suprême, il ne peut le donner. – Si je vous prouve que rien n’a été soustrait à son jugement ; cesserez-vous cette controverse téméraire ? Or, écoutez le Christ lui-même : Le Père ne juge personne, il a donné tout jugement au Fils. (Jn. 5, 22) Si donc le Père a tout pouvoir de juger, rien n’a été excepté de sa juridiction. Celui de qui tout jugement relève est maître, à l’égard de tous, de récompenser et de couronner. Ces mots : Il a donné, ne doivent pas être pris dans leur sens propre. Le Père n’a pas donné à quelqu’un qui n’avait pas, il n’a pas engendré une personne imparfaite, à qui il aurait fait ce don plus tard. Il a engendré le Fils parfait, infini. Si Jésus-Christ se sert de cette expression, c’est pour exclure deux dieux engendrés, distinguer le fruit de la racine, et non pour vous faire croire à un perfectionnement successif. Ailleurs on lui demande : Vous êtes donc roi (Jn. 18, 37) ; il ne répond pas : J’ai reçu la royauté, ni la royauté m’a été donnée plus tard ; mais : C’est pour cela que je suis né. S’il est né roi, à plus forte raison est-il juge et arbitre. Car il appartient au roi de juger, de décider, d’honorer, de punir. D’autres textes nous prouvent aussi que c’est à lui de donner les récompenses célestes. Quand je vous aurai montré le plus saint des hommes couronné par le Fils, quelle excuse aurez-vous encore ?
Quel est donc cet homme ! Quel autre, sinon ce faiseur de tentes, ce docteur des nations qui a parcouru la terre et la mer comme avec des ailes, ce vase d’élection, ce paranymphe du Christ, ce fondateur de l’Église, architecte sage, héraut, athlète, soldat, qui a laissé par toute la terre des monuments de sa vertu, qui a été ravi au troisième ciel, qui a connu les mystères ineffables de Dieu, qui a entendu des choses que la langue de l’homme ne peut raconter, qui a reçu des grâces abondantes et supporté d’immenses travaux ? Qu’il ait travaillé plus que tous les autres, il le dit lui-même ; écoutez-le : J’ai travaillé plus que tous les autres. (1Co. 15, 10) S’il en est ainsi, sa couronne sera aussi plus belle : Car chacun recevra sa récompense selon son travail. (Id. 3, 8) Si sa couronne est plus brillante que celle des autres apôtres, et personne n’égale les apôtres qu’il surpasse lui-même, il est évident qu’il jouira de l’honneur suprême et de la prééminence. Or, qui le couronnera ? Écoutez : J’ai bien combattu, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi. Il me reste à attendre la couronne de la justice, que Dieu, comme un juste juge, me rendra en ce jour. (2Ti. 4, 7)