Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 2, 1864.djvu/282

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

en effet Moïse annonce aux Hébreux le Maître à qui ils doivent obéir ponctuellement. Que tout soit donc un enseignement pour nous, ses actes, ses paroles, et aussi le miracle que l’on vient de vous lire. Quel est-il ? C’était un jour de fête des Juifs, et Jésus monta à Jérusalem. Or il y a à Jérusalem la piscine paralytique appelée en hébreu Bethsaïde ; elle a cinq portiques. (Jn. 5, 1) L’ange du Seigneur, dit l’Évangile, y descendait à certain temps, ce qu’annonçait l’agitation de l’eau. Le premier qui y entrait après que l’eau avait été ainsi agitée était guéri, quelque maladie qu’il eût. Sous les portiques étaient couchés un grand nombre de malades, d’aveugles, de boiteux et d’autres qui avaient des membres desséchés, et tous attendaient l’agitation de l’eau.
Pourquoi Jésus-Christ choisit-il toujours Jérusalem de ses plus grandes œuvres, et se montre-t-il aux Juifs de préférence les jours de fêtes ? C’est qu’alors le peuple était réuni ; c’était le lieu et le temps de rencontrer les malades. Car ces infortunés désiraient moins ardemment leur guérison que le médecin lui-même. Quand la foule est nombreuse, l’assemblée considérable, Jésus-Christ se présente pour procurer le salut. Il y avait donc une grande multitude de malades attendant l’agitation de l’eau ; le premier qui descendait alors était guéri, mais non le second. La puissance du remède était épuisée, l’eau restait sans vertu, et la maladie du premier malade descendu lui avait enlevé toute sa force. Et il devait en être ainsi, car c’était une grâce d’esclave. Mais à l’avènement du Seigneur, il n’en est plus de même. Le premier qui descend dans la piscine des eaux du baptême n’est pas seul guéri. Le premier, le second, le troisième, le quatrième, le dixième, le centième, le sont aussi. Et quand il y en aurait dix mille, cent mille, une multitude innombrable, quand toute la terre descendrait dans la piscine, la grâce ne serait pas diminuée, elle resterait la même et aussi puissante. Telle est la différence entre le pouvoir de l’esclave et l’autorité du maître. L’un ne guérit qu’un malade, l’autre toute la terre ; l’un ne guérit qu’une fois l’an, l’autre chaque jour et des millions d’infirmes. L’un descend et agite l’eau ; pour l’autre, il suffit de prononcer son nom sur l’eau afin de lui communiquer cette admirable vertu. L’un guérit les corps, l’autre les âmes. Quelle immense différence sous tous rapports !
2. Il y avait donc une grande multitude attendant l’agitation de l’eau. Car il s’opérait là des guérisons miraculeuses. Dans un hôpital on voit des malades, des estropiés, des infirmes de toute espèce qui attendent l’arrivée du médecin ; de même on voyait là une multitude nombreuse. Sous ces portiques était un homme malade depuis trente-huit ans. Jésus l’ayant vu couché par terre et sachant qu’il était malade depuis longtemps, lui dit : Voulez-vous être guéri ? Le malade lui répondit : Oui, Seigneur ; mais je n’ai personne pour me jeter dans la piscine après que l’eau a été troublée, et pendant le temps que je mets à y aller, un autre descend avant moi. (Jn. 5, 5) Pourquoi Jésus-Christ, laissant tous les autres, vient-il à celui-ci ? Pour montrer tout en semble sa puissance et sa bonté : sa puissance, puisque la maladie était si grave et qu’il n’y avait plus d’espoir de guérison ; sa bonté, parce que, bon et miséricordieux, Jésus daigna regarder de préférence celui qui était le plus digne de pitié et de compassion. Le lieu, le nombre de trente-huit ans de maladie, tout est à bien considérer.
Écoutez, vous tous qui luttez contre la pauvreté et la maladie, qui êtes accablés par les difficultés et les inquiétudes de cette vie, et éprouvés par des catastrophes imprévues. Il y a dans l’exemple du paralytique de quoi consoler toutes les infortunes humaines. Qui donc, en considérant cet exemple, aurait assez peu d’esprit et de cœur pour ne pas supporter avec courage et avec générosité les accidents de cette vie ? Vingt ans, dix et même cinq ans, n’était-ce pas assez pour lasser sa constance ? Et il attend trente-huit ans sans se décourager, et avec la plus grande patience. Cette persévérance vous étonne ; écoutez ses paroles, et vous admirerez encore davantage sa sagesse et sa vertu. Jésus s’approche et lui dit : Voulez-vous être guéri ? Qui doute qu’il ne le désire ? Pourquoi donc l’interroger ? Ce n’est pas par ignorance, car celui qui connaît les pensées les plus secrètes n’ignore pas ce qui est clair et évident pour tous. Pourquoi donc l’interroger ? Ailleurs, quand Jésus dit au centurion : J’irai et je le guérirai (Mat. 8, 7) : il n’ignorait pas sa réponse ; mais tout en la prévoyant et la connaissant parfaitement, il voulait lui donner l’occasion de manifester sa foi jusqu’alors cachée, et de dire : Non, Seigneur, je ne suis pas digne que vous entriez dans ma maison. Il en est de même