Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 2, 1864.djvu/510

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du Lazare, nous avons beaucoup raisonné sur la résurrection et sur le dernier jugement ; le passage de saint Paul nous ramène encore au même sujet, et si nous creusons ce passage, nous trouverons le même trésor. Nous avions alors pour but d’apprendre aux auditeurs à ne pas se laisser éblouir parle faux éclat des biens de ce monde, mais à pénétrer plus avant par l’espérance, à penser tous les jours aux sentences rigoureuses qui seront rendues dans les derniers temps, à ce jugement redoutable, à ce Juge incorruptible. Dans ce qu’on vient de nous lire, saint Paul vous donne aujourd’hui le même conseil que vous devez écouter avec attention : Je ne veux pas, dit-il, mes frères, que vous ignoriez ce que vous devez savoir touchant ceux qui dorment du sommeil de la mort, afin que vous ne vous affligiez pas comme font les autres hommes qui n’ont point d’espérance. Car si nous croyons que Jésus est mort et ressuscité, nous devons croire aussi que Dieu amènera avec Jésus ceux qui se seront endormis en lui du sommeil de la mort.
Il est à propos de nous arrêter d’abord à examiner pourquoi, lorsque saint Paul parle de Jésus-Christ, il appelle mort sa mort ; au lieu que lorsqu’il parle de notre fin, il la nomme sommeil ; et non pas mort, car il ne dit pas : touchant ceux qui sont morts, mais touchant ceux qui dorment. Et plus bas : Nous devons croire aussi que Dieu amènera avec Jésus ceux qui se seront endormis. Il ne dit pas : ceux qui seront morts. Il continue : Nous, dit-il\it, qui vivons, et qui sommes réservés pour l’avènement du Seigneur, nous ne préviendrons pas ceux qui sont déjà endormis. Il ne dit pas ici non plus : ceux qui sont morts ; mais parlant pour la troisième fois de la mort de l’homme, il la nomme sommeil. Au contraire, lorsqu’il parle de Jésus-Christ, comment s’exprime-t-il ? Car si nous croyons que Jésus est mort. Il ne dit pas : est endormi, mais : est mort. Pourquoi donc appelle-t-il la mort de Jésus-Christ mort, et la nôtre sommeil ? Ce n’est point sans cause et au hasard qu’il s’est servi de cette expression plutôt que d’une autre ; il cache sous ces paroles un sens profond et sublime. En parlant du Fils de Dieu il se sert du nom de mort, afin de confirmer le supplice qu’il a subi pour nous : en parlant de l’homme il emploie le nom de sommeil, afin de consoler notre tristesse. Comme la mort de Jésus-Christ a été suivie de la résurrection, il ne craint pas de l’appeler mort ; mais comme chez nous la résurrection n’est qu’en espoir, il nomme notre mort sommeil, se servant d’une expression propre à nous consoler, propre à nous donner d’heureuses espérances. Celui qui dort se réveillera sans doute ; or, la mort n’est autre chose qu’un long sommeil. Et ne me dites pas que celui qui est mort ne parle plus, qu’il n’entend, ne voit, ne sent rien : car celui qui dort est dans le même état ; et s’il faut dire quelque chose de surprenant, c’est que l’âme de celui qui dort est comme endormie, au lieu que l’âme de celui qui est mort est réveillée.
Mais, direz-vous, son corps pourrit et se corrompt, il devient cendre et poussière. Mais c’est pour cela, mon cher frère, que nous devons surtout nous réjouir. En effet, lorsqu’on veut reconstruire une vieille maison qui tombe en ruines, après avoir fait sortir les habitants, on détruit la maison même pour la rebâtir plus belle ; et loin que ceux qu’on a fait sortir s’affligent, ils se réjouissent, parce qu’ils considèrent moins la destruction qui frappe actuellement leur vue, qu’ils n’imaginent la reconstruction qui est dans l’éloignement de l’avenir. De même, lorsque Dieu veut détruire notre corps, il en fait d’abord sortir l’âme comme d’une maison, afin de la faire rentrer avec plus de gloire dans cette maison qu’il aura rebâtie plus belle. Ne considérons donc pas la destruction présente, mais la splendeur future de la demeure détruite.
2. Un artiste a-t-il entre les mains une statue usée par la rouille et par le temps, mutilée clans plusieurs de ses parties, il la brise, la jette dans le fourneau, la fait fondre avec soin pour la refaire plus belle. La statue brisée pour être jetée dans le fourneau n’est pas détruite, mais renouvelée : ainsi la mort de nos corps n’est pas une destruction, mais un renouvellement. Lors donc que vous voyez notre chair se pourrir et se fondre dans la fournaise du tombeau, ne vous en tenez pas à ce que vos yeux aperçoivent, mais attendez la refonte, et, sans vous arrêter au changement opéré dans une statue, allez plus avant par l’imagination. Le statuaire qui jette dans le fourneau un corps d’airain, ne vous rend pas une statue d’or et immortelle, mais il la refait de nouveau en airain. Il n’en est pas de même de Dieu ; il jette dans le fourneau un corps de boue et mortel, et il vous rend une statue d’or et immortelle. La