Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 2, 1864.djvu/532

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avec quel espoir reprendrons-nous ces mêmes labeurs, et leur offrirons-nous cet enseignement spirituel, quand nous voyons qu’ils n’en retirent plus aucun fruit ; mais que cédant simplement à une habitude ils applaudissent, il est vrai, à ce que nous disons, et nous témoignent qu’ils accueillent avec plaisir nos paroles ; et qu’après cela, courant de nouveau aux jeux du cirque, ils accueillent avec de plus grands applaudissements les conducteurs de char, et montrent un enthousiasme effréné, les accompagnant avec de grands efforts, et en venant souvent aux coups les uns avec les autres ? On les entend dire : ce cheval n’a pas bien couru, cet autre a trébuché et s’est abattu : celui-ci est pour un cocher, celui-là pour un autre. Aucune pensée sérieuse ne réveille en eux la mémoire de nos paroles ni des mystères spirituels et terribles qui s’accomplissent ici ; mais comme enlacés par les filets du diable, ils passent la journée livrés tout entiers à ce spectacle de Satan, exposés aux injures des Juifs et des Gentils, et de tous ceux qui veulent tourner en dérision notre croyance.
Qui donc, quand même il aurait un cœur de pierre et serait tout à fait insensible, pourrait supporter cela sans douleur ? Encore moins le pourrions-nous nous-même qui nous efforçons (le vous témoigner une affection de père. Ce qui nous afflige, ce n’est pas seulement que vous rendez nos fatigues inutiles ; mais nous sommes bien plus émus lorsque nous venons à penser que ceux qui agissent ainsi rendent leur condamnation plus terrible. Pour nous en effet, nous attendons du Seigneur la récompense de nos travaux, car nous avons fait tout ce qui était de notre devoir : nous avons placé l’argent, nous avons distribué le talent (lui nous avait été confié, et nous n’avons rien omis de ce qui nous concernait. Mais ceux (lui ont reçu ces richesses spirituelles, dites-moi, quelle excuse allégueront-ils, quel pardon obtiendront-ils quand on leur demandera non-seulement ces richesses, mais encore leur rapport ? De quels yeux verront-ils leur juge ? comment supporteront-ils ce jour redoutable, ces intolérables supplices ? pourront-ils se rejeter sur leur ignorance ? Mais chaque jour nos enseignements retentissent à vos oreilles, chaque jour nous avertissons, nous exhortons, nous indiquons le danger de la séduction, la gravité du dommage, la trompeuse amorce de ces réunions sataniques ; et malgré cela nous n’avons pu vous toucher ! Mais pourquoi parler de ce jour formidable ? En attendant, occupons-nous des choses d’ici-bas. Comment, dites-moi, ceux qui assistent à ce spectacle diabolique pourront-ils venir ici avec quelque assurance, avec une conscience révoltée et qui oppose de vives réclamations ? N’entendent-ils donc pas ces paroles du bienheureux Paul, le docteur de la terre entière ? Quelle union, y a-t-il entre la lumière et les ténèbres, ou quelle société entre le fidèle et l’infidèle ? (2Co. 6, 14) N’est-ce pas une chose bien condamnable que le fidèle, qui participe aux prières et aux terribles mystères qui s’accomplissent ici, et reçoit un enseignement tout spirituel, en sortant de nos cérémonies, aille s’asseoir à ce spectacle de Satan avec l’infidèle ? celui qui est éclairé des rayons du soleil de justice, à côté de celui qui erre dans les ténèbres de l’impiété ? Comment, dites-le-moi, pourrons-nous désormais fermer la bouche aux Gentils ou bien aux Juifs ? Comment pourrons-nous les presser et leur persuader d’embrasser la religion, s’ils voient ceux qui ont rang parmi nous confondus avec eux dans ces théâtres pernicieux et remplis de l’ordure de tous les vices ? Pour quel motif, dites-moi, après être venus ici, après avoir purifié vos âmes et amené vos esprits à la chasteté et à la componction, aller de nouveau vous souiller en ce lieu ? N’entendez-vous pas ces paroles d’un sage : Si l’un bâtit et que l’autre détruise, que gagneront-ils sinon la peine ? (Sir. 34, 28) C’est là précisément ce qui arrive aujourd’hui. En effet, si lorsque j’ai bâti quelque chose ici dans vos âmes par la continuité de mes enseignements et par mes avertissements spirituels, vous rendant à la hâte dans cet endroit-là, vous détruisez tout et renversez tout, pour ainsi dire, sur le sol, à quoi nous servira-t-il de reprendre une seconde fois la construction, si c’est pour la détruire de nouveau ? Ne serait-ce pas une grande sottise et de la démence ? Dites-moi, si dans les constructions matérielles qui se font avec des pierres, vous aperceviez quelqu’un agir de la sorte, ne le regarderiez-vous pas comme un fou, comme un homme qui se fatigue en vain et sans profit, et qui dépense inutilement son argent ? Eh bien ! raisonnez de la même manière de la construction spirituelle et jugez-en de même. Car voyez : chargé par la grâce de Dieu de cette fonction, nous élevons chaque jour plus haut cet édifice spirituel, et nous nous efforçons