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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/139

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supérieurs même aux méditations de l’intelligence humaine, le Prophète dit : « Son nom est saint et terrible. » Or s’il est saint, il exige de ceux qui veulent le célébrer dans leurs hymnes, une bouche sainte, une bouche sainte et pure.
« La crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse. La véritable intelligence est en ceux qui l’éprouvent (10). » Que signifie ce mot « commencement ? » C’est-à-dire que la crainte du Seigneur est la source, est la racine, est la base de la sagesse. Après avoir parlé avec tant de pompe et de solennité du Maître de la terre et montré combien il était frappé de crainte et de respect, le Prophète en vient naturellement à prononcer les paroles que je viens de citer, pour nous prouver que celui qui craint le Seigneur est rempli de toute sagesse et possède la véritable intelligence. Ensuite, afin qu’on ne croie pas qu’il suffit pour être sage de connaître Dieu, il ajoute : « La véritable intelligence est en ceux qui l’éprouvent. » La foi ne suffit point, si notre conduite n’est d’accord avec elle. Comment se fait-il que la crainte du Seigneur soit le commencement de la sagesse ? C’est qu’elle chasse de notre cœur tous les vices pour mettre à la place toutes les vertus. Par sagesse, le Prophète n’entend pas la sagesse des paroles, mais celle des actions, car ceux-là même qui n’appartiennent pas à l’Église ont défini la sagesse, la distinction des choses divines et des choses humaines. Cette distinction, la crainte de Dieu nous apprend à la faire, en éloignant le vice de notre âme, en y faisant germer la vertu à la place, en nous préparant à faire fi des biens présents, en tournant nos regards vers le ciel. Quoi de plus sage qu’une âme ainsi préparée !
Dans ce passage, ce que veut le Prophète, ce n’est pas seulement un auditeur, mais un homme qui pratique. « La véritable intelligence est en ceux qui l’éprouvent », c’est-à-dire ceux qui pratiquent la sagesse et qui le montrent par leurs actions, ceux-là ont la véritable intelligence. « La bonne et véritable intelligence », dit-il, car il y a la fausse et mauvaise intelligence, comme lorsqu’il lit : « Ils sont sages pour faire le mal, mais ne savent pas faire le bien. » (Jer. 4,22) Ce qu’il veut, c’est que l’intelligence soit mise au service de la vertu.
« Sa louange subsiste dans les siècles des siècles. » En quoi consiste cette louange, dites-moi ? Elle consiste dans nos actions de grâces, dans sa glorification, glorification éternelle qui procède de ses œuvres et qui même les précède, et qui est un de ses attributs essentiels. Car Dieu est éternel, et par lui-même infiniment louable, il est louable quand on considère sa grandeur et toutes ses autres qualités, il est louable aussi à cause de ses œuvres, quand on sait distinguer sa sagesse dans le spectacle de la création. Si le Prophète parle ainsi, c’est pour nous exhorter à rendre à Dieu des actions de grâces, et pour nous montrer qu’ils sont indignes de tout pardon, même de ce pardon banal que l’on prodigue à toutes sortes de fautes, ceux qui murmurent contre ce qu’il fait. En effet, puisqu’il est si évident, si clair, si manifeste qu’il a droit à nos louanges, à nos actions de grâces et à nos hommages, puisque sa gloire est assise sur des fondements tellement solides, tellement inébranlables, qu’elle défie les atteintes de la mort et qu’elle ne connaît ni limites, ni fin, ne pouvons-nous pas dire de ceux qui osent blasphémer contre elle, qu’ils nient ce qui est plus évident que le soleil, et qu’ils se rendent volontairement aveugles. Car la gloire de Dieu n’est pas une gloire passagère qui puisse excuser leur ignorance, elle n’est ni douteuse, ni obscure : non, non, elle est manifeste, elle est durable, elle est immortelle et reste toujours immortelle, et n’aura jamais de fin.
Traduit par M. A. BOUCHERIE