Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/282

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

nous pas qu’il fait un acte de bonté, d’humanité ? N’admirerons-nous pas bien davantage la sagesse et la clémence de Dieu, qui emploie de tels moyens pour corriger ceux qui lui appartiennent ? Ce qu’il faut donc, à chaque instant, c’est admirer et glorifier Dieu. Et ce qui fait que nous ne cesserons jamais de méditer avec étonnement sa providence, que nous ne cesserons jamais de le louer, c’est la rapidité avec laquelle il a pratiqué l’amputation, supprimé la racine du mal, et pratiqué un traitement sans douleur. Ne vous troublez donc pas, à cette pensée, que tous les hommes, tout à coup, en un moment, ont été engloutis. Qu’importe que leur châtiment se soit opéré ainsi, ou d’une manière insensible ? Que fait, à celui qui meurt, quel avantage pour lui de mourir seul, ou quel mal éprouve-t-il de ce qu’il meurt avec tous les hommes ? « Exaucez-moi selon l’équité de votre justice », c’est-à-dire, avec bonté, avec clémence. C’est là sa pensée, et ce qui le prouve c’est ce qu’il ajoute : « Et n’entrez point en jugement avec votre serviteur. » C’est également la prière de Job qui était « un homme juste, ami de la vérité et fuyant le mal. » (Job. 1,1) Il disait : « Il n’y a personne qui puisse juger les deux parties, ni prononcer entre les deux. » (Job. 9,33) Et quand Dieu lui apparut : « Je n’ai qu’à mettre ma main sur ma bouche. » (Id. 39, 34) Ce qu’il disait, quoique Dieu le provoquât et lui dît « Ceignez vos reins comme un homme. » (Id. 42) C’est encore là le reproche que l’Écriture adresse aux Juifs : « Quelle injustice vos pères avaient-ils trouvée en moi, lorsque vos chefs se sont conduits injustement envers moi ? » (Jer. 2,5)
Or, si Dieu tient cette conduite, c’est qu’il ne veut pas prononcer contre eux un jugement trop sévère. Il veut les amener à sentir leurs péchés, à les confesser, afin de pouvoir leur accorder le pardon et leur faire connaître ainsi la grandeur de ses bienfaits. Et voilà pourquoi Dieu fait entendre cette parole : « Dis le premier tes iniquités ; » non point pour être condamné, mais, « Pour être justifié. » (Isaïe. 43,26) Voilà pourquoi ce n’est pas Dieu lui – même qui les énonce ; il prépare le pêcheur à les révéler. S’il voulait punir, il accuserait lui-même ; mais, au contraire ; parce qu’il veut faire miséricorde, il cède la parole au pécheur, afin que le pécheur reçoive la couronne de la reconnaissance, et que, par la confession, il s’attire la miséricorde. Qu’y a-t-il de comparable à cette bonté ? rien. Parlez, dit le Seigneur, et je ne demande rien de plus ; faites votre confession, et il me suffit ; dites, et c’en est fait, je m’abstiens. « N’entrez point en jugement avec votre serviteur. » Beaucoup d’hommes se conduisent bien, parce que Dieu les jugera. En effet, les sages connaissent depuis longtemps le jugement à venir ; quant aux insensés, à force d’entendre cette parole perpétuellement répétée des prophètes : « Le Seigneur veut entrer en jugement avec son peuple, et se justifier devant Israël (Michée, 11,2) ; » et encore : « Écoutez, vallées et fondements de la terre (Id) ; » et encore : « Cieux, écoutez, et toi, terre, prête l’oreille (Is. 1,1) ; » par suite de ce perpétuel jugement dont il est parlé, les insensés mêmes ont su se bien conduire. En effet, quelques Juifs disaient : « Pourquoi avons-nous jeûné, sans que vous nous ayez regardés ? » (Is. 58,3) Et : « Quiconque fait le mal, fait le bien devant la face du Seigneur. » (Malachie, 2,17) Et : « Ceux qui vivent dans l’impiété, s’établissent, et nous les appelons des hommes heureux (Ibid ni, 15) ; » et : « La voix du Seigneur n’est pas équitable. » (Ez. 33,17) Or, le bienheureux Job lui-même, quand il fut saisi par la tentation, ne pensa pas comme les Juifs, ne parla pas comme eux ; gardons-nous de le croire. Il dit toutefois : « Pourquoi n’y a-t-il personne qui puisse juger les deux parties, et prononcer entre les deux ? Qu’il retire donc sa verge de dessus moi, et que sa terreur ne m’épouvante pas. » (Job. 9,33, 34) De là vient que le Seigneur lui dit : « Je vous interrogerai ; pour vous, « répondez-moi. » (Job. 42,4) Il avait été frappé de stupeur, après avoir dit : « Pourquoi suis-je encore jugé pendant que je suis corrigé et que j’accuse le Seigneur (Job. 11,4) ? » il dit encore : « J’avais seulement entendu parler de vous, maintenant, au contraire, je vous vois de mes propres yeux. » (Id. 42,5, 6) « J’ai parlé avec trop de légèreté, et je me suis anéanti à mes yeux ; je ne me suis plus regardé que comme terre et cendre ; je n’ai qu’à mettre ma main sur ma bouche. » (Job. 39,34) Alors Dieu lui dit : « Non, mais ceignez vos reins comme un homme. » On dirait qu’il lui rappelle ses paroles, et qu’il veut lui faire entendre ceci : Puisque vous avez voulu plaider