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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/309

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La grande fertilité de l’année, l’abondance des fruits ; il veut encore leur montrer que celte abondance ne doit être attribuée ni à la terre, ni à l’air, mais à la providence de Dieu. Comment s’exerce cette providence ? Il le dit aussitôt : « Il te rassasie du meilleur froment. » Voyez : il ne dit pas seulement, de froment, mais : « Du meilleur froment », pour montrer combien est grande la prospérité. « Le meilleur froment » signifie, ce qu’il y a, dans le fruit, de plus délicat et de plus nourrissant ; tels sont en effet les dons de Dieu, fortifiants et délicats. Donc, Dieu répand sur eux, de la manière la plus magnifique, le meilleur froment ; pour montrer cette magnificence, le Psalmiste ne dit pas, il te donne, mais : « Il te rassasie. Il envoie sa parole à la terre (4). » L’habitude du Psalmiste est de passer du particulier au général, et de revenir du général au particulier ; ce qu’il fait encore ici. Car, à propos de cette parole. « Loue ton Dieu », un insensé aurait pu croire que ce Dieu était seulement le Dieu des Juifs ; le Psalmiste montre comment c’est le Dieu de la terre entière ; comment sa providence s’étend sur tout l’univers, et il laisse le particulier pour ce qui s’applique à tout, pour la providence étendue sur tous en général. Aussi, après avoir dit : « Il envoie sa parole à la terre », le Palmiste ajoute, « Et cette parole court avec vitesse. » Ce qu’il dit, c’est pour montrer que Dieu s’inquiète non seulement de notre pays, mais de la terre entière. Quant au mot « parole », il signifie l’ordre, l’opération par laquelle Dieu pourvoit. Et maintenant pour montrer la facilité, la promptitude de l’action divine, le mot parole ne suffisant pas, l’auteur dit que la parole court, et ce n’est pas encore assez pour lui ; aussitôt il ajoute, avec vitesse. Ce qui revient à dire : Quel que soit l’ordre de Dieu, il s’accomplit avec la plus grande rapidité. C’est à la terre entière qu’il commande, et maintenant, que commande-t-il ? ce qui est nécessaire, pour que nous puissions vivre ; ce qui se rapporte à la nature de l’air, aux changements et aux vicissitudes des saisons, et voilà pourquoi le texte ajoute : « Il envoie la neige, comme de la laine ; la gelée blanche, comme de la cendre (5). » Un autre texte : « Le givre ; » l’hébreu porte « chephor » qui veut dire, pluie fine ou brouillard, et « choepher » qui veut dire rosée condensée. « Il envoie sa glace, divisée en une infinité de parties. « Qui pourra soutenir la rigueur de son froid (6) ? » Un autre texte : « Qui pourra soutenir sa chaleur ? Il enverra sa parole et il fera fondre toutes ces glaces ; son esprit soufflera et les eaux couleront (7). » Il s’agit de cette puissance infinie qui produit ce qui n’est pas ; transforme les créatures, et les façonne comme il lui plaît.
2. C’est ce qu’exprimait aussi un autre prophète, en disant : « Qui fait toutes choses, et les transforme. » (Amo. 5,8) La nature a des bornes invariables ; cependant quand Dieu commande, ces bornes disparaissent. Toutes choses en effet se plient à sa volonté. Quelquefois il change les substances ; d’autres fois, les substances persistent, mais il les fait servir à d’autres fins. Il laisse sommeiller en elles la vertu qui leur est propre, et il leur donne une vertu contraire ; ce qu’il a fait à propos de la fournaise. II y avait là du feu qui ne brûlait pas, et ceux qui étaient jetés dans la fournaise, y sentaient la rosée la plus agréable. Les Juifs traversaient la mer, et les flots ne les engloutissaient pas, et le peuple trouvait un sol plus résistant que la pierre. Dathan et Abiron sentaient bien la terre sous leurs pieds ; cette terre toutefois ne les supporta pas, et les engloutit plus vite que la mer. La verge d’Aaron était du bois sec, et elle porta un plus beau fruit que les arbres plantés en pleine terre. L’ânesse de Balaam était, de tous les animaux, le plus stupide, et cependant, frappée par Balaain, elle se défendit aussi bien que l’homme le plus sage. Quand Daniel fut jeté dans la fosse, il y avait des lions, qui montrèrent la douceur des brebis ; leur nature ne fut pas détruite, mais leurs œuvres furent changées. On peut voir bien d’autres merveilles, même dans les êtres inanimés. Ces prodiges, qui se répètent chaque année, qui tombent sous nos yeux, ne sont pas pour cela moins dignes d’admiration. Considérez, en effet, ce prodige de la neige qui bientôt devient de l’eau, et subit, en si peu d’instants, de si grandes transformations. Il ne faut pas perdre le sens des choses au point d’attribuer ces changements à l’action naturelle des éléments, au point de les considérer comme s’ils en étaient uniquement les causes. Voilà pourquoi le Psalmiste montre ici avec tant de soin quel est Celui qui commande, et la puissance de son commandement. « Il enverra sa parole et il fera fondre toutes ces glaces. » Sa parole, veut dire son ordre ; ce n’est pas la